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Sky Muglach

- Gladys Marivat

A21 ans, Sky Muglach – ce n’est pas un pseudonyme – fait sensation avec un roman « yaoi » (retenez ce mot !), devenant la première Française à s’emparer de ce genre littéraire « made in Japan » et très populaire en Corée. Née à Besançon (où elle vit toujours), la jeune écrivaine reprend dans son premier roman, K-Love (Rivages), tous les codes de ces bandes dessinées qui mettent en scène les amours de garçons androgynes. Très sentimenta­le, cette littératur­e fait plutôt dans l’érotisme, la pornograph­ie soft. En Asie – c’est le paradoxe – le « yaoi » est plébiscité par un lectorat féminin adolescent. Comment une Française allait-elle alors s’approprier un genre aussi culturelle­ment marqué? Situé à Séoul, K-Love suit les déboires et les premiers émois de Tokki, le narrateur. Adolescent et mouton noir d’une famille qui se veut exemplaire, il s’enfuit pour échapper aux coups de son père. Rapidement, il plonge dans les bas-fonds de la capitale coréenne, un milieu de dealers et de prostitués qui lui paraît plus honnête. Tokki se drogue et se prostitue à son tour avant de nouer une relation destructri­ce avec son dealer et de tomber amoureux de son sauveur. Tout est étonnant dans ce livre. Sa forme d’abord, car, bien que sans image,

K-Love se lit comme une bande dessinée, où dialogues et voix off sont signalés par une typographi­e différente. Découpé en courts chapitres, le roman s’aborde à la manière d’un feuilleton. Mais sa légèreté n’est qu’apparente. Porté par des personnage­s subtils, le livre nous interroge sur le poids des « qu’en-dira-t-on » dans la bourgeoisi­e coréenne. C’est l’autre bizarrerie – et la réussite – de ce roman hybride, très chabrolien au fond, qui démontre comment les secrets de famille patiemment enfouis finissent toujours par nous exploser à la figure.

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