Des citoyens comme les autres
Philippe ALEXANDRE Une évocation sensible de l’histoire des juifs de France.
Pierre Birnbaum les avait appelés les « fous de la République » . « Fous », comme on est fou d’amour. Ces passionnés de la République française, c’était les juifs de France que la Révolution avait émancipés, c’est-à-dire qu’elle avait faits citoyens comme tout autre Français, sans considération de « race ou de religion » . Certes, ils avaient cher payé cette accession à la citoyenneté. « Tout comme individu, rien comme Nation » : telle était la condition mise par Clermont-Tonnerre à leur entrée dans la communauté nationale. Ainsi était posé le modèle du franco-judaïsme, fait d’assimilation et exempt de communautarisme. Les juifs de France s’y sont en- gagés avec ardeur. En quelques générations, ils ont accédé aux positions les plus brillantes, et ont été les plus ardents constructeurs de la République. Même l’affaire Dreyfus, qui a libéré l’antisémitisme le plus ravageur, a été conclue par la reconnaissance de l’innocence et l’exigence de réparation.
La famille de Philippe Alexandre a vécu tout cela. D’origine mosellane, elle a, en 1870, choisi la France. A Paris, les enfants ont prospéré dans le commerce et accédé aux plus hautes positions sociales. Du judaïsme des ancêtres, il ne restait que quelques traces. Les lois antisémites du gouvernement de Vichy frappèrent donc comme un coup de tonnerre. Ce qu’il fallu alors de courage et de chance pour échapper au sort tragique qui leur était promis, Philippe Alexandre – qui a 9 ans à l’époque – le raconte avec sensibilité, émotion et aussi confiance en une France lumineuse malgré ses ombres. Marc Riglet