L’autre ami islandais
Au croisement du polar scandinave et du « cosy mystery », un Islandais nommé Ragnar Jónasson…
Son nom est Jonasson, Ragnar Jónasson. Un quadragénaire réputé « impassible », « professionnel à l’anglo- saxonne » et « sportif » (dixit son éditrice française, Marie Leroy), que les lecteurs français avaient rencontré pour la première fois lors de l’édition 2017 de Quais du Polar, à Lyon. Bien que traduit aujourd’hui dans vingt et un pays ( dont les États- Unis, l’Angleterre, la Suède), Jónasson a conservé son métier d’avocat fiscaliste. Il a pris goût au roman policier en lisant Agatha Christie, et a d’ailleurs traduit quatorze romans de son « modèle ». C’est ainsi qu’est né, sous sa plume, ce compromis entre le roman à énigme et le récit descriptif, ouvert sur son environnement. Il faut tout de même en avoir sous la semelle pour écrire des huis clos… à ciel ouvert.
Quant à son héros, son nom est Thór, Ari Thór. Il n’a rien d’un surhomme, il est plutôt le « boy next door ». En France, nous l’avons découvert avec Snjór (La Martinière, 2016, repris chez Points/Policier) où, fraîchement sorti de l’école de police de Reykjavik, il était envoyé à Siglufjördur – mille deux cents âmes, le village islandais le plus septentrional – pour enquêter sur un double meurtre. Dans Mörk (paru l’an dernier, qui reparaît en format poche ce printemps), il était chargé de faire toute la lumière sur la mort de son collègue, l’inspecteur Herjólfur, assassiné alors qu’il enquêtait près d’une maison abandonnée dans cette même bourgade du grand Nord. Laquelle, décidément, est la grande affaire de ce flic comme de son auteur, puisque ce dernier nous y menait déjà dans Nátt, le roman qui vient de paraître en France, mais qui était sorti en Islande en 2011.
Snójr, Mörk et Nátt peuvent se lire indépendamment. À chaque fois, Jónasson parvient à nous surprendre, dès les premières pages, avec des personnages étonnamment complexes, une belle finesse psychologique et une véritable maîtrise des descriptions. Arnaldur Indridason s’intéresse au passé, Lilja Sigurdardottir est dans l’intrigue internationale, Arni Thorarinsson, du côté du blues et de la corruption. Ragnar Jónasson, parvenant à mêler des affaires intimes à des histoires qui disent la spécificité insulaire, s’octroie une belle place à leurs côtés.