10 QUESTIONS INCONTOURNABLES AVANT DE SE LANCER
Qui n’a pas rêvé un jour de voir son nom sur la couverture d’un livre et de tenir, enfin, cet objet mythique entre les mains ? Mais avant d’en arriver là, il est nécessaire de réfléchir au processus à suivre et à son coût. En se posant les bonnes questions, celles qui vous ouvriront les portes de l’édition.
1 NUMÉRIQUE OU PAPIER : QUELLE OPTION CHOISIR POUR L’ENVOI DE SON MANUSCRIT ?
Il n’y a malheureusement aucune réponse toute faite à cette question. Le plus important est de consulter directement le site des éditeurs auxquels vous souhaitez adresser vos manuscrits. Si de plus en plus de maisons d’édition passent au tout numérique pour des raisons pratiques et écologiques, sachez que les « grands » éditeurs tels que Gallimard, Albin Michel, Grasset, Flammarion, Fayard ou Robert Laffont n’acceptent pas l’envoi de manuscrit en pièce jointe d’un e-mail.
2 ADRESSER SON MANUSCRIT AU BON ÉDITEUR : QUELLES SONT LES ASTUCES POUR DÉCRYPTER LES CATALOGUES DES MAISONS D’ÉDITION ?
Une fois l’écriture terminée, les auteurs ont souvent comme premier réflexe de vouloir forcer le destin et d’envoyer au hasard leurs oeuvres à tous les éditeurs. Ce n’est pas la bonne stratégie. Sélectionnez méticuleusement les maisons que vous allez viser. Bien que long et fastidieux, ce travail de recherche est primordial. Avant toute chose, étudiez le genre de livres publiés par chacune d’elles. Adresser un roman policier à une maison d’édition spécialisée dans la littérature jeunesse vous
fera perdre du temps et de l’argent. De la même manière, faites attention à la place accordée aux publications françaises dans les différents catalogues car certains éditeurs ne publient que des auteurs étrangers. Regardez ensuite la place attribuée aux premiers romans, les maisons qui misent sur les jeunes talents sont forcément plus intéressantes pour vous. Prenez aussi en compte leur image ainsi que leur visibilité en librairies. Ce sont des petits plus qui peuvent vous conforter dans votre choix. Enfin, sachez que les maisons mères cachent souvent de plus petits éditeurs. Plus l’envoi est ciblé, plus un manuscrit aura de chance d’être apprécié à sa juste valeur.
3 POURQUOI ET COMMENT PROTÉGER SON MANUSCRIT ?
S’il n’est pas obligatoire de faire enregistrer son manuscrit avant la signature d’un contrat avec un éditeur (ou avant sa publication en ligne), ce dépôt peut s’avérer judicieux. Ainsi, comme il est rappelé sur le site de la Société des gens de lettres (SGDL), « les droits d’auteur attachés à l’oeuvre existent du seul fait de sa création. La titularité des droits n’est pas conditionnée par un dépôt ou un enregistrement préalable. En revanche, ce dépôt peut être important en matière de preuve : il permet d’établir une date de
création certaine de l’oeuvre en cas de litige ou de contestation, notamment dans le cadre d’un plagiat ». Pour déposer votre manuscrit, plusieurs solutions s’offrent à vous : le faire enregistrer auprès d’associations d’écrivains, chez un notaire ou à l’INPI (Institut national de la propriété industrielle). Il est par ailleurs possible de le déposer sous sa forme imprimée ou numérique pour en assurer la titularité des droits, mais aussi sa sauvegarde.
UN AUTEUR PERÇOIT 8 % DE DROITS JUSQU’À 10 000 EXEMPLAIRES VENDUS
4 QUELLE RÉMUNÉRATION POUR UNE PUBLICATION À COMPTE D’ÉDITEUR ?
Si vous avez la chance d’être édité, un contrat vient sceller les conditions de publication. L’édition à compte d’éditeur implique que l’auteur cède ses droits de diffusion, d’exploitation et de représentation contre une rémunération. Il perçoit, pour une période déterminée, une rémunération proportionnelle au nombre de livres vendus, qui correspond à un certain pourcentage de leur prix hors taxe. La règle est généralement de payer à un auteur 8 % de droits jusqu’à 10 000 exemplaires vendus, 10 % entre 10 000 et 20 000 exemplaires et 12 % au-dessus. Certains écrivains à succès approchent parfois même les 20 %. Jean d’Ormesson, par exemple, était surnommé « Monsieur 18 % ». Imaginez que votre premier roman fonctionne bien et atteigne la barre des 1 000 ventes. Avec un droit d’auteur de 8 % sur un livre qui coûte en moyenne 20 euros (18,90 euros hors taxe), cela représentera donc un gain de 1 512 euros. Une somme que vous toucherez souvent un ou deux ans après la parution du livre…
L’une des autres spécificités de la publication à compte d’éditeur est l’à-valoir : une avance sur les droits d’auteur. Cette « prime à la signature » est très fréquente mais sachez que certains éditeurs ne la pratiquent pas. En moyenne, vous pouvez espérer toucher entre 500 et 1 500 euros pour un premier roman. Le paiement est effectué soit à la signature du contrat soit en plusieurs parties à la signature et à la parution du livre. Bien évidemment, les sommes grimpent en flèche au fur et à mesure de votre carrière et peuvent atteindre plusieurs centaines de milliers d’euros pour les auteurs à succès.
5 QUELS SONT LES AVANTAGES ET LES PIÈGES DE L’ÉDITION À COMPTE D’AUTEUR ?
Frustrés par les refus des maisons traditionnelles mais toujours convaincus de l’intérêt de leur manuscrit, certains auteurs cherchent par tous les moyens à publier leur livre. Il arrive alors que des éditeurs leur proposent d’éditer leur roman en échange d’argent. C’est ce qu’on appelle la publication à compte d’auteur. L’avantage principal de ce mode opératoire est que vous êtes sûr de réaliser votre rêve. Vous assumez votre projet jusqu’au bout et choisissez de mettre les moyens pour y parvenir. Mais soyons clairs, cette méthode a mauvaise réputation et cumule beaucoup d’inconvénients. D’abord, vous n’êtes jamais sûr de payer le bon prix. Certaines maisons d’édition à compte d’auteur facturent abusivement les écrivains. C’est un pari qui peut coûter cher, jusqu’à 8 000 euros pour la publication de votre livre. Vous aurez surtout beaucoup de difficultés à le vendre. Si la maison d’édition à compte d’auteur s’engage à imprimer et fabriquer votre roman, c’est à vous d’en assurer la promotion et la vente. Or la plupart des librairies et des réseaux de distributeurs de livres ne traitent qu’avec les maisons d’édition traditionnelles. Et c’est sans parler de la critique… Vous devrez donc miser uniquement sur la vente de votre oeuvre par le bouche-à-oreille ou via votre entourage. Autant dire un doux rêve.
6 L’AUTOÉDITION PEUT-ELLE ÊTRE UNE BONNE STRATÉGIE ?
Hier dénigrée, l’autoédition (qui se distingue de l’édition à compte d’auteur au sens où l’auteur ne passe pas par l’intermédiaire d’une maison d’édition qu’il rémunère pour publier son livre) n’est plus synonyme d’amateurisme, primo-romanciers comme écrivains confirmés pouvant désormais l’envisager comme une alternative à la publication à compte d’éditeur.
Ses avantages ? Une maîtrise totale du texte et du temps nécessaire à sa rédaction, l’entière propriété des droits d’auteur et la perception intégrale des recettes de vente. Ses limites ? La prise en charge de chacune des étapes de la publication, de la mise en pages de l’ouvrage à sa promotion, sans oublier les formalités légales, la distribution, la gestion du stockage en cas d’impression de l’ouvrage… Si certaines plateformes en ligne proposent d’accompagner l’écrivain autoédité dans ces diverses étapes, la prudence reste de mise quant aux pratiques de la plateforme choisie, tant sur les questions relatives à la propriété intellectuelle qu’à propos du pourcentage de royalties perçues sur les ventes. Car même si elle garantit à l’auteur une certaine liberté, l’autoédition n’en demeure pas moins un marché.
7 EST-IL JUDICIEUX DE SE CRÉER UNE « E-RÉPUTATION » POUR SE FAIRE REPÉRER ?
Pour l’apprenti écrivain, Internet peut s’avérer un formidable outil afin de se faire repérer, à condition de soigner l’image de soi renvoyée sur la Toile et de ne pas disqualifier ses écrits à cause de photos ou commentaires peu flatteurs. Si les plateformes d’autoédition en ligne ont désormais l’attention des maisons les plus prestigieuses (certaines
bénéficiant de partenariats avec des éditeurs), les réseaux sociaux, les blogs voire les sites de grands journaux ouverts aux contributions d’anonymes représentent un moyen, certes chronophage mais pouvant être payant, de se constituer un premier cercle de lecteurs.
Actuellement, c’est sur Instagram, réseau social jugé accessible et bienveillant, que les contes de fées prennent le plus souvent forme. Mais à ce jeu, la loi du nombre prévaut, car plus grande sera votre communauté, plus importantes seront vos chances d’être remarqué. À vous de mesurer l’énergie à consacrer (ou non) à cette présence numérique, et les avantages d’ajouter à votre casquette d’écrivain celle de chef de produit marketing…
8 COMMENT BIEN PRÉSENTER UN MANUSCRIT POUR SÉDUIRE LES ÉDITEURS ?
Toute maison d’édition assure la mise en pages finale d’un livre en fonction de la charte éditoriale qui lui est propre. Pour autant, il est essentiel que votre manuscrit respecte certaines règles de clarté favorisant le confort de lecture de votre interlocuteur. Ainsi, une mise en pages aérée, avec un interligne d’1,5 ou 2, des marges importantes, une police de caractères traditionnelle plutôt que fantaisiste ( et taille 12), un texte justifié ( aligné à gauche comme à droite) et affichant sa pagination valoriseront incontestablement vos écrits. N’oubliez pas que les éditeurs reçoivent chaque jour un grand nombre de manuscrits et que la lecture sur smartphone, qui disqualifie d’emblée les mises en pages trop denses ou brouillonnes, tend à se démocratiser. Enfin, si quelques fautes d’orthographe ne voueront pas votre texte aux gémonies, leur récurrence peut le rendre illisible. Plusieurs relectures s’imposent donc, par vos soins ou ceux d’un proche qui pourra s’enorgueillir d’avoir été votre premier lecteur.
9 INVESTIR POUR PERFECTIONNER VOTRE ÉCRITURE VOUS DONNE-T-IL PLUS DE CHANCE D’ÊTRE PUBLIÉ ?
Les ateliers d’écriture séduisent un public de plus en plus large, mais représentent un investissement important. Si la plupart des établissements, comme Aleph, les ateliers Emmanuel Bing ou Les Mots, font osciller leur prix entre 15 et 30 euros de l’heure, la note peut rapidement grimper. Pour ceux qui désireraient l’excellence de la maison Gallimard par exemple, Les Ateliers de la NRF facturent 1 500 euros les vingtquatre heures de cours, soit 62 euros de l’heure ! Si vous êtes en mesure de faire cet investissement, il peut s’avérer payant. En plus des précieux conseils et enseignements qui y sont dispensés, ces ateliers d’écriture vous permettront d’entrer en contact avec des personnes influentes du monde de l’édition. La plupart des cours sont assurés par des écrivains ou des éditeurs qui peuvent vous mettre en relation avec les bonnes personnes ou pousser votre texte jusqu’à une éventuelle publication.
Pour les jeunes générations, une autre méthode de perfectionnement peut se révéler moins coûteuse. Les masters de création littéraire, comme ceux de Paris 8 ou du Havre, sont de véritables pépinières d’écrivains. Si vous êtes engagé dans des études littéraires ou artistiques, vous pouvez postuler à ces formations continues de deux ans. David Lopez, par exemple, venait d’être diplômé du master de création littéraire de Paris 8 quand son premier roman, Fief (Seuil), a reçu le prix du Livre Inter 2018.
10 ENGAGER UN AGENT LITTÉRAIRE EST-IL UN RÉEL ATOUT ?
Intermédiaire entre l’éditeur et son auteur, l’agent littéraire négocie les à-valoir, le pourcentage sur les ventes, les cessions de droits étrangers et audiovisuels, la durée du contrat conclu…, autant de sujets que l’écrivain, qui n’est pas (contrairement à son éditeur) un professionnel de l’édition, maîtrise rarement. Auprès d’un débutant, l’agent peut par ailleurs faire office de premier lecteur, dont le choix de représenter ou non le texte proposé renseignera l’auteur sur la qualité de ce dernier. Avant de prendre contact avec un agent, deux questions prévalent : êtes-vous prêt à vous engager dans une relation tripartite ? À verser un pourcentage de vos futures recettes (en moyenne, 15 %) à cet intermédiaire ? Même si un nombre croissant de jeunes écrivains choisissent de s’entourer d’un agent, la pratique reste marginale dans l’Hexagone où la relation auteur/éditeur est sanctifiée. Mais dans un marché de plus en plus concurrentiel, le choix peut s’avérer judicieux à long terme. Il ne dispense pour autant en aucun cas un auteur de se renseigner sur ses droits.