Trafic d’influence
Les blogueurs littéraires accèdent enfin à la reconnaissance mais demandent une professionnalisation de leur métier.
Si l’essor des blogueurs date du début des années 2000, l’avènement des réseaux sociaux et notamment d’Instagram en 2010 a entraîné une importante redistribution des cartes. Influenceurs, « bookstagrammeurs » ou « booktubeurs » : tous sont devenus
des acteurs majeurs du monde littéraire. Pourtant,
si leur fonction s’est codifiée au fil des années, la
professionnalisation de ces métiers n’en est encore qu’à ses prémices. Leur statut est aux antipodes de
celui des influenceurs officiant dans le domaine
de la mode ou du voyage, dont les rémunérations atteignent aujourd’hui des sommets.
C’est dans ce contexte que, ces dernières semaines, est réapparu sur les réseaux sociaux le hashtag #payetonblogueur, relayant un appel collectif mené par ces chroniqueurs littéraires 2.0 pour une reconnaissance de leur statut et une rémunération liée à leur activité, s’appuyant sur le marché américain pour étayer leurs revendications.
Aux États-Unis, la tarification de la chronique est
parfaitement intégrée alors qu’en France, pays du prestige littéraire, cela semble inenvisageable?
Les influenceurs littéraires français pourront-ils
un jour vivre de leur travail ? Alors qu’ils font
émerger une façon inédite de promouvoir la lecture, le chemin paraît encore long… On perçoit néanmoins plusieurs signaux positifs. Au fil des
années, des contacts privilégiés se sont noués entre ces nouveaux acteurs et les éditeurs, qui les intègrent désormais à toutes les opérations promotionnelles. Il y a des victoires symboliques, comme le succès impressionnant du Grand Prix des blogueurs littéraires lancé en 2017 par Agathe
Ruga (Agathe the Book), et des victoires de fond
comme l’ouverture progressive des comités de lecture des grandes maisons aux chroniqueurs les
plus influents. La professionnalisation est donc
en marche, ce n’est qu’une question de temps.