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« J’avais l’impression de vivre dans une dystopie »

Connu pour son humour grinçant, l’écrivain d’origine russe Iegor Gran avait déjà égratigné les ONG et les écologiste­s. Ce trublion publie aujourd’hui un bref essai autour de la crise du Covid-19, où tout le monde en prend pour son grade. Explicatio­ns sans

- Propos recueillis par Baptiste Liger

À quel moment avez-vous décidé d’écrire sur la crise dite du Covid ? Iegor Gran. Le 12 mars, lorsque j’ai appris que les écoles allaient être fermées. Il y avait là un symbole fort : la scolarité était moins importante que la crise sanitaire. Comme si on vivait quelque chose de l’ampleur d’une guerre nucléaire. L’exécutif – en France comme ailleurs – voulait jouer à la guerre, avec son lot de privations de liberté. C’est une sale maladie, oui, mais on en a vu d’autres. J’avais l’impression de vivre dans une dystopie.

Pourquoi les gens qui applaudiss­aient aux fenêtres vous ont-ils agacé ? I.G. Il y avait d’abord le croque-mort Jérôme Salomon qui faisait chaque soir le décompte des disparus et, une heure après, on applaudiss­ait par bonne conscience. On avait même des DJs amateurs qui mettaient de la musique à fond, comme s’il s’agissait d’une fête. Il ne faut pas s’étonner qu’à la fin du confinemen­t, certains aient eu un coup de blues. C’était un spectacle sinistre, une farce cruelle. Être critique fait de vous au mieux un rêveur, au pire un affreux salaud à rééduquer! Désolé, mais je n’avais pas l’impression de vivre dans le même univers.

Ces derniers mois sont-ils pour vous l’expression de tous les égoïsmes ? I.G. Il n’y en avait que pour une seule maladie. J’ai un ami très atteint d’un autre mal dont on a stoppé la rééducatio­n à cause de ça, devenant un estropié du Covid ! Aussi, quand j’entends certains privilégié­s, dénués d’empathie, dire à ceux qui, en raison de cette crise, ont perdu leur emploi « vous n’avez qu’à trouver une autre vocation », « c’est l’occasion de vous réinventer » et autres « vous n’avez pas d’économies », je suis très en colère… On va sûrement me dire que je suis réac, mais je m’en moque : je ne sais même pas ce que cela signifie.

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CES CASSEROLES QUI APPLAUDISS­ENT AUX FENÊTRES, IEGOR GRAN,
144 P., P.O.L, 13 €
★★★☆☆ CES CASSEROLES QUI APPLAUDISS­ENT AUX FENÊTRES, IEGOR GRAN, 144 P., P.O.L, 13 €

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