MARQUE-PAGE
Le statut de grand voyageur n’empêche pas les envies de proximité. Y compris pour les Parisiens. Aragon écrivait pourtant, dans Aurélien : « Cela n’a pas de sens de marcher le long de la Seine. Après il faut revenir. On est bien avancé. » S’il a parcouru le globe, Jean Rolin connaît toutefois bien l’Hexagone. Les ports, mais aussi Paris et ses alentours (relisez La Clôture). Le projet de son nouveau livre ? « Mener sur les berges de la Seine, entre Melun et Mantes, des reconnaissances aléatoires, au fil des saisons, dans un désordre voulu. » Avec, pour emblème et « pivot de ce dispositif », le pont de Bezons, donnant son titre à cet ouvrage, lequel va muter au fil des pages… On se promène ainsi avec plaisir dans le 7-7, le 9-3 et autres départements limitrophes, en compagnie d’un Jean Rolin nonchalant. Chers à l’écrivain, les oiseaux ne manquent pas – des cygnes, des vanneaux huppés, sans oublier un pigeon décapité. On s’amusera des tribulations gastronomiques de notre homme, tiraillé entre un McDo, un Courtepaille et un Chick’n Grill halal, et quelques aventures piquantes (citons les menaces d’un étrange homme « à la planche » et l’achat contestable de deux jeans à moins 70% !). Si Le Pont de Bezons ne manque pas d’humour, il montre aussi une certaine mélancolie, avec l’évocation d’une vieille histoire de famille, du côté de Carrières-sous-Bois. Preuve que nos vies sont toujours ancrées dans les terres.