FRANCESCA SERRA
GÉNÉRATION DÉCONNECTÉE
Il y a cet âge, l’adolescence, où l’on commence à se brûler les ailes. On réalise tôt, parfois, qu’on est un peu court, alors on fait comme si, et on apprend à se surpasser autrement. C’est ce qui va arriver à Garance Sollogoub, 15 ans, jusque-là fille sans histoires de la petite ville balnéaire et fictive d’Ilarène, dans le Sud-Est de la France. Une année scolaire charnière (2015-2016) balayée par des vents fous, justifiant les près de cinq cents pages du premier roman de Francesca Serra.
Pour commencer, voilà qu’un concours de mannequins fait étape ici. Garance est favorite car elle est, comme sa mère, professeure de danse appréciée, d’une « beauté racée ». Provoquant les jalousies au sein du cercle d’adolescents qu’elle a intégré. Un soir, elle tombe dans un piège. Et après avoir tout fait pour être vue, elle va disparaître.
L’auteure raconte la façon dont les millennials ne vivent qu’au travers des réseaux sociaux, décortiquant les mécanismes d’aliénation à Snapchat, Facebook et Instagram. À cette strate narrative s’y ajoutent une autre, qui décrit les lieux, et aussi la mère, Ana Sollogoub. Nous réservant des passages sur la féminité, la maternité, l’autorité, la transmission avec une écriture élégante et ultraréaliste. Enfin, une dernière lame nous prend au col, car la fuite de Garance nous mène au coeur du véritable sujet de ce récit quasi expérimental : le droit à l’image et le droit à l’oubli. Bien que souffrant de quelques longueurs, Elle a menti pour les ailes est porté par une force centrifuge ahurissante et une variation de langues remarquable.