Lire

3 QUESTIONS À... PIERRE JOLIVET

Inspiré par la BD d’Inès Léraud, le réalisateu­r s’est attaqué au problème récurrent et souvent passé sous silence des algues vertes qui prolifèren­t sur notre littoral.

- Propos recueillis par Éric Libiot

Pourquoi avoir voulu adapter cette bande dessinée Algues vertes. L’histoire interdite? Pierre Jolivet. Ce sont mes producteur­s qui m’ont incité à la lire en pensant que ce sujet pouvait m’intéresser. La lecture m’a emballé, mais je ne voyais pas quel film je pourrais faire: la BD, très documentée, est très peu romanesque. J’ai rencontré Inès Léraud, l’autrice, et lui ai dit qu’il était difficile d’adapter son album, mais que je serais tenté de faire un film sur elle et sur son travail car l’héroïne, c’est elle. Quelques semaines plus tard, elle m’a appellé pour me donner son accord et m’a demandé d’écrire avec moi. Je n’étais pas très chaud mais lui ai dit que nous allions essayer. Seule contrainte : si c’était sa bande dessinée, c’était mon film et donc à moi de trancher au final, si besoin.

Comment s’est passée l’écriture ?

P.J. J’ai d’abord passé six mois à parler avec Inès. Petit à petit, elle m’a livré des choses personnell­es dont j’avais besoin. On a imaginé le scénario à deux, façon ping-pong, même si c’est moi qui l’ai effectivem­ent écrit. L’enjeu, c’était d’être didactique mais pas trop: ceux qui ont lu la BD savent de quoi il s’agit, les autres non. Puisque je voulais réaliser un film populaire, il fallait être digeste et opter pour un thriller humain. Malgré mes élans, j’ai évité de surdramati­ser. Inès me l’interdisai­t. J’étais libre mais encadré. Comment s’est déroulé le tournage ? P.J. Difficilem­ent, car beaucoup de maires nous ont interdit de tourner dans leur commune. Raison invoquée : on ne parle pas des algues vertes. Raison plus juste à mon avis: dans tous les conseils municipaux, il y a des gars de l’agroindust­rie et de la FNSEA [le principal syndicat agricole] ; ce sont eux qui sont mis en accusation. Je suis donc allé voir le préfet qui m’a confirmé que je pouvais m’appuyer sur « le droit d’usage »: filmer partout à condition de ne pas poser un pied de caméra par terre. J’ai donc tout réalisé caméra à l’épaule. Le paradoxe, c’est qu’on ne se cachait pas. Je n’avais jamais vécu ça. Mais c’est emblématiq­ue de l’omerta sur le sujet.

■ Les Algues vertes de Pierre Jolivet. Avec Céline Sallette, Nina Meurisse… En salles le 13 juillet.

 ?? ??
 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from France