L'Obs

Pour saluer Melville

PAR JEAN-PIERRE MELVILLE, AVEC LINO VENTURA, SIMONE SIGNORET, PAUL MEURISSE (1969, 2H19). EN SALLES LE 13 MAI : (1962, 1H48), (1970, 2H20) ET (1972, 1H38).

- PASCAL MÉRIGEAU

C’est une scène d’horreur, sans un cri, sans une goutte de sang, sans une image choc : des hommes que rien n’a préparés à cela, mais qui ont choisi de s’opposer à l’occupant allemand, doivent exécuter un traître dans une maison de Marseille sans tirer un coup de feu. C’est extraordin­aire. Des moments comme celui-là, « l’Armée des ombres », d’après Joseph Kessel, en compte beaucoup : les condamnés que les Allemands font courir dans un tunnel pour les tirer comme des lapins, une femme exemplaire qu’il faut supprimer, deux frères qui, sans le savoir, combattent dans le même camp. Le film de JeanPierre Melville, à une scène près (la rencontre à Londres avec de Gaulle), qui en 1969 passait moins qu’aujourd’hui et fut reprochée à l’auteur, est admirable, sans une once de graisse, sans un gramme de sentimenta­lité. Ce que le cinéma a donné de plus fort sur cette époque est là. « L’Armée des ombres » et le « Monsieur Klein » de Joseph Losey sont les deux grands films de la France occupée.

Trois films noirs du plus américain des cinéastes français ressortent également en copies restaurées, « le Doulos », chef-d’oeuvre du polar hexagonal, et « le Cercle rouge ». Quant à son dernier film, « Un flic », réalisé dans des conditions très di ciles (les maquettes de l’attaque du train sont hallucinan­tes), il a laissé un souvenir moins impérissab­le, mais mérite d’être revu. Un souhait ? Qu’on réédite le magistral et moins connu « Bob le Flambeur » (1956). Jean-Pierre Melville, né Grumbach, est mort le 2 août 1973, il avait 55 ans.

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Lino Ventura dans « l’Armée des ombres ».

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