Un bipolaire sous la Révolution
LE BOUFFON DE LA MONTAGNE, PAR CHRISTOPHE BIGOT, LA MARTINIÈRE, 377 P., 20 EUROS.
Les Français n’ont jamais tant pris la plume qu’en 1789. Chez le citoyen Laurent Lecointre, négociant versaillais aux premières loges de la Révolution, cela tourna à la pathologie. Pour écrire « le Bouffon de la montagne », Christophe Bigot, professeur de lettres et d’épopées révolutionnaires, a scruté la moindre page de ce graphomane qui, des journées d’octobre 1789 à celles de thermidor, courut après la gloire au péril de sa vie et de sa réputation tout en couchant sur le papier les oscillations de son humeur. On le retrouve un jour au plus bas, n’osant pas se présenter à la députation pour complaire au royalisme sentimental de son épouse, un autre jour au plus haut, dispersant son pécule pour recevoir à sa table Mirabeau et Marat. En le montrant tour à tour suicidaire et exalté, incapable de satisfaire un coeur qui balance « entre Jacobins et Cordeliers, la Convention et la Commune, les bancs de la représentation nationale et le pavé des faubourgs », Bigot nous conte avec brio et loufoquerie les tribulations d’un bipolaire sous la Révolution.