Forces de l’ordre : un lourd bilan
L’adjudant Imad Ibn Ziaten, sous-officier du 1er régiment du train parachutiste de Francazal, tué le 11 mars 2012 par Mohammed Merah. Le caporal-chef Abel Chennouf, parachutiste à Montauban, tué le 15 mars 2012 par Merah. Le caporal Mohamed Legouad, parachutiste à Montauban, tué le 15 mars 2012 par Merah. Franck Brinsolaro, 49 ans, brigadier affecté à la protection du dessinateur Charb, tué le mercredi 7 janvier 2015 à « Charlie Hebdo ». Ahmed Merabet, 40 ans, brigadier en poste à la brigade VTT du commissariat du 11e arrondissement de Paris, tué par les frères Kouachi à proximité de « Charlie Hebdo. » Clarissa Jean-Philippe, 27 ans, policière municipale à Montrouge, abattue le 8 janvier 2015 par Amédy Coulibaly. Jean-Baptiste Salvaing, 42 ans, commandant de police aux Mureaux, tué le 13 juin 2016 par Larossi Abballa.
couteau, renversez-le avec votre voiture, jetez-le d’une falaise, étranglez-le, empoisonnez-le ».
Cet appel explicite à mener le djihad contre les forces de l’ordre sur le sol européen avait déjà été suivi d’effet. Deux mois après l’ordre de « Cheikh Adnani », en décembre 2014, un jeune homme d’origine burundaise, récemment converti à l’islam, agresse au couteau trois policiers devant l’entrée du commissariat de Joué-lès-Tours (Indre-et-Loire) en criant « Allah akbar ». Il est abattu. On pense l’incident isolé mais les policiers et les militaires sont effectivement devenus une cible privilégiée de ces « loups solitaires » aux comportements imprévisibles. "Cette tragédie vient nous rappeler toute la complexité du risque terroriste qui peut se traduire par des tueries de masse, mais aussi par des passages à l’acte d’une extrême violence, visant des cibles désignées par Daesh en raison notamment de leur profession dans des appels au meurtre qui sont régulièrement diffusés par l’organisation terroriste", rappelle le procureur de Paris François Molins. La liste continue tragiquement. En février 2015, Moussa Coulibaly, originaire de la région parisienne, agresse au couteau des soldats en faction devant la synagogue de Nice. En garde-à-vue, il exprimera sa haine de la France, de la police, des militaires et des juifs. Fin octobre 2015, un individu est arrêté à Toulon. Il projetait une attaque des militaires de la base navale de la ville. Le 7 janvier 2016, un Tunisien tente d’attaquer le commissariat du XVIIIe arrondissement avec un hachoir de boucher et muni d’une fausse ceinture d’explosifs. Lui-aussi sera abattu devant l’entrée. En janvier 2016, Tarik Jadaoun, un djihadiste belge proche d’Abaaoud, avait clairement menacé un policier belge sur Facebook en publiant un commentaire sous une photo de ce dernier : « Quand je verrais ta tête, je sortirais ma kalachnikov ». Les deux hommes étaient tous les deux originaires de Verviers et avaient des amis en commun. Le policier se retrouvera sous protection rapprochée.
Les forces de l’ordre sont également les cibles de réseaux plus organisés. Démantelée en janvier 2015 par les forces spéciales de la police belge, la cellule de Verviers projetait l’enlèvement d’un magistrat ou d’un policier ainsi que l’attaque d’un commissariat. De fausses tenues de policiers avaient été retrouvées dans l’appartement conspiratif. Malgré cet échec, le cerveau de la cellule, le belge Abdelhamid Abaaoud, gardera son objectif en tête. Selon le témoignage d’une amie d’Hasna Ait Boulahcen, sa cousine, Abaaoud, lors d’une rencontre alors qu’il s’était réfugié dans un buisson en bordure de périphérique, aurait confié vouloir s’attaquer à un commissariat de la Défense. Comme beaucoup d’autres terroristes, Abaaoud affichait un passé de petit délinquant. Tous ces soldats de Daech qui ont d’abord été mis en cause dans des affaires de droit commun, ont croisé un jour les forces de police de leur quartier, de leur ville. Le discours de haine à l’égard des forces de l’ordre véhiculé par l’EI entreraitil en résonnance avec de vieilles rancoeurs ? Comme une vieille haine remis au goût du jour ?
Du côté des policiers, ce double meurtre a provoqué un traumatisme profond. « Pour la première fois, le terrorisme a choisi une cible à son domicile, souligne Céline Berthon, du syndicat des Commissaires de la Police nationale. Personne n’avait jamais été ciblé chez lui. Pour la première fois, cela arrive et c’est un policier qui en est victime. » Jusque-là, explique-t-elle, toutes les victimes étaient tombées dans le cadre de l’exercice de leur fonctions. Désormais, la peur s’est invitée au seuil même de leurs maisons. « Vous n’imaginez pas le nombre de collègues que j’ai rencontré ce matin qui ont expliqué l’inquiétude extrêmement présente de leur femme ou de leur compagne », témoigne Céline Berthon.