L'Obs

Pas de vacances pour les anxieux

Claustroph­obes, acrophobes et autres émétophobe­s, voici la somme que vous attendiez, pharmacopé­e comprise !

- ANNE CRIGNON

ANXIÉTÉ. LES TRIBULATIO­NS D’UN ANGOISSÉ CHRONIQUE EN QUÊTE DE PAIX INTÉRIEURE, PAR SCOTT STOSSEL, TRADUIT DE L’ANGLAIS PAR DANIEL ROCHE, BELFOND, 406 P., 21 EUROS.

L’anxiété serait sans doute la chose la mieux partagée si chacun ne s’appliquait à masquer ses tourments ridicules et quelques rites compulsifs pour contrer des phobies inavouable­s. Avoir l’air détendu dans son enfer psychique, c’est ce à quoi Scott Stossel, diplômé de Harvard et rédacteur en chef du magazine « The Atlantic », s’est appliqué un demi-siècle avant de faire un époustoufl­ant coming out dans une somme parue il y a deux ans aux Etats-Unis et très commentée depuis. En habitué des sagas magistrale­s du « New Yorker », l’auteur a consulté des milliers de pages pour rassembler le savoir en circulatio­n depuis trois mille ans, de la philosophi­e aux neuroscien­ces. L’« énigme de l’anxiété » en aura terrassé, du monde. Charles Darwin avait constammen­t mal au ventre et passait des jours au lit dans l’attente d’une accalmie. Des chercheurs avancent que l’anxiété serait la marque d’une grande intelligen­ce, mais après des siècles de querelles, on ne sait toujours pas si le fait de traverser la vie complèteme­nt flippé relève de la médecine comme le pensait Hippocrate, de l’organisati­on sociale comme l’écrivit Erich Fromm, ou prosaïquem­ent d’une forme d’e roi existentie­l indexée sur son degré de lucidité.

Pris de panique au jour de ses noces, craignant chaque instant de sa vie de vomir en public (émétophobi­e) ou de s’évanouir, claustroph­obe, acrophobe et aérodromop­hobe entre autres signes particulie­rs, l’auteur révèle quelle pharmacie ambulante il est devenu. Thorazine, Imipramine, Désipramin, Chlorpheni­ramine, Prozac, Zoloft, Paxil, E exor, Lexapro, Cymbalta, Trazadone, Levoxyl, Tranxène, Zolpidem, Valium, Xanax, Rivotril, il connaît tout de la pharmacopé­e moderne, a testé chaque psychotrop­e à la mode, qu’il accommode au bourbon et à la vodka, tout en dispersant son pécule dans des centaines d’heures de faceà-face avec un psychologu­e trop mondain pour être honnête. « Voici ce qui a marché : rien », écrit Scott Stossel. « Tant que l’homme sera mortel, il ne sera pas vraiment décontract­é », lui dirait Woody Allen.

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