Fallait-il l’inviter?
ATROCITY EXHIBITION, PAR DANNY BROWN (WARP).
Les rappeurs atteignent souvent leurs sommets sur les disques des autres. Invités pour un couplet, ils sont plus à l’aise. Ils n’ont pas à faire oeuvre. Ils n’ont pas la maison de disques sur le dos. Ils peuvent grimacer librement. Chaque époque a son roi du featuring. Jadis, ç’a été Eminem. Ces temps-ci, il est rare qu’un disque de rap américain sorte sans son « Lamar track » : une chanson, semblable aux autres, mais augmentée d’un 16-rimes de Kendrick Lamar. Citons, récemment, « Wat’s Wrong » sur l’excellent album d’Isaiah Rashad, et « Really Doe » sur celui de Danny Brown. Sur ces deux morceaux, le Californien se fend de performances exubérantes. Envoyer un carton d’invitation à Lamar a l’air d’une bonne idée. En trois albums, il a tout bouleversé. Le prestige de son nom contamine la puissance invitante. Mais les rappeurs devraient s’en méfier. Ils souffrent de la comparaison. La visite de Lamar n’est pas une visite de courtoisie. Il impose une intensité qu’ils ne peuvent pas suivre, même le luxuriant Danny Brown. Quand l’invité se retire, l’hôte a soudain l’air nul.