L'Obs

Fallait-il l’inviter?

ATROCITY EXHIBITION, PAR DANNY BROWN (WARP).

- DAVID CAVIGLIOLI

Les rappeurs atteignent souvent leurs sommets sur les disques des autres. Invités pour un couplet, ils sont plus à l’aise. Ils n’ont pas à faire oeuvre. Ils n’ont pas la maison de disques sur le dos. Ils peuvent grimacer librement. Chaque époque a son roi du featuring. Jadis, ç’a été Eminem. Ces temps-ci, il est rare qu’un disque de rap américain sorte sans son « Lamar track » : une chanson, semblable aux autres, mais augmentée d’un 16-rimes de Kendrick Lamar. Citons, récemment, « Wat’s Wrong » sur l’excellent album d’Isaiah Rashad, et « Really Doe » sur celui de Danny Brown. Sur ces deux morceaux, le Californie­n se fend de performanc­es exubérante­s. Envoyer un carton d’invitation à Lamar a l’air d’une bonne idée. En trois albums, il a tout bouleversé. Le prestige de son nom contamine la puissance invitante. Mais les rappeurs devraient s’en méfier. Ils souffrent de la comparaiso­n. La visite de Lamar n’est pas une visite de courtoisie. Il impose une intensité qu’ils ne peuvent pas suivre, même le luxuriant Danny Brown. Quand l’invité se retire, l’hôte a soudain l’air nul.

Newspapers in French

Newspapers from France