L'Obs

Olivia Giacobetti

Ce nez féminin multiplie les terrains d’expériment­ation olfactive en créant des parfums singuliers et uniques

- Par DORANE VIGNANDO

QUI EST ELLE ?

Une discrète petite porte noire rue La Bruyère à Paris et, derrière, un joli jardin. C’est ici, dans ses « cuisines », son laboratoir­e cerné de verdure et de grands bambous, qu’Olivia Giacobetti vient plancher sur son orgue à parfums d’où sortiront des cocktails gagnants de nouvelles senteurs. « J’ai toujours voulu faire ce métier. Je l’ai découvert au cinéma à l’âge de 10 ans dans le film “le Sauvage” de Jean-Paul Rappeneau », dit-elle de sa voix grave et sensuelle. Depuis, le « nez » de cette femme, qui partage sa vie entre Paris et New York, a fait du chemin : collaborat­ions avec l’Artisan Parfumeur, Diptyque, Hermès, Frédéric Malle… Sans oublier des parfums d’ambiance pour le palace La Mamounia, à Marrakech, l’Hôtel Costes, à Paris, en passant par les saveurs d’une ligne de bonbons pour La Pâtisserie des Rêves ou une bougie parfumée pour la bibliothèq­ue de l’Observatoi­re du Vatican. Olivia Giacobetti possède aussi sa propre boutique parisienne (13, rue de Tournon), baptisée Iunx : des élixirs en série limitée présentés comme des fleurs rares : lorsque l’on s’approche des corolles de papier, elles s’éclairent et libèrent leur parfum.

D’OÙ VIENT ELLE ?

Avec un père qui s’appelle Francis Giacobetti, photograph­e toujours en partance et mondialeme­nt connu, Olivia, la petite dernière d’une fratrie de trois filles, a rapidement volé de ses propres ailes. A 17 ans, elle entre chez Robertet à Grasse, leader mondial des matières premières aromatique­s. « J’y ai découvert un véritable langage composé de 2 000 notes. Je m’étais tellement ennuyée à l’école que ce monde odorant a donné sens à mon avenir. » Elle s’a ranchira néanmoins assez rapidement du monde de l’entreprise pour suivre ses propres envies. D’abord en fondant sa société Iskia, qui lui permet de collaborer avec les plus grandes marques en free-lance, puis en créant sa marque de parfums Iunx, où elle se donne entière carte blanche.

QUE FAIT ELLE ?

« J’ai souvent trouvé les parfums trop abstraits, trop chargés, trop bourgeois. Pour moi, la modernité est ailleurs, je veux raconter des histoires, les odeurs de la vie, des rencontres, des lieux… » Elle garde tout ce qu’elle trouve. Des morceaux de bois, des tissus, des cailloux… Et peut « passer des mois à essayer de retrouver le “râpeux” d’une feuille, la chaleur d’un bois ». Question de vie et de souvenir. Comme celui retrouvé dans une molécule de synthèse baptisée l’isobutyl quinoléine : « Il sent précisémen­t pour moi ce matin d’automne sous la pluie avec mon père et l’odeur de caoutchouc de son imperméabl­e qu’il me glisse sur les épaules. » Elle pourrait écrire un roman de toutes ces scènes imaginées ou réelles ayant eu une incidence sur la création de ses fragrances. « Il y a des parfums qui vous déshabille­nt et d’autres qui vous protègent. J’aime cette idée-là. »

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