L'Obs

“IL ME MANQUE UNE PARTIE DE MON HISTOIRE”

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Vincent, 38 ans, ingénieur

« J’ai été conçu en 1979, par inséminati­on artificiel­le avec donneur anonyme (IAD). A l’époque, les équipes conseillai­ent aux parents de ne rien dire. Je ne l’ai appris qu’à l’âge de 30 ans. J’étais alors en thérapie car je n’allais pas bien. C’est ma mère qui me l’a révélé, et c’est comme si j’avais enfin vu la lumière. J’avais tout pressenti. Depuis longtemps, je me cherchais des pères putatifs, alors même que mes relations avec mon père étaient bonnes. Lorsque j’ai su, j’étais très soulagé. Mais, après la phase d’euphorie, j’ai fait une dépression. Ma vie était bâtie sur un mensonge. J’ai mis beaucoup de temps à digérer. Le centre de don a refusé de me donner le nom du donneur. Je suis contre cet anonymat. Certains m’opposent que bien des enfants ne connaissen­t pas leur père ou sont issus d’un adultère. Sauf que, dans leur cas, ce n’est pas la société tout entière qui les prive de leur histoire ! Moi, c’est la loi qui m’interdit de savoir. Il faudrait, comme pour les enfants nés sous X, pouvoir faire savoir au donneur que l’on veut le connaître et, si ce dernier le souhaite aussi, le contact pourrait être établi. J’ai des parents, mais il me manque une partie de mon histoire. Comme si la moitié de ma génétique n’avait pas droit de cité. » PROPOS RECUEILLIS PAR CÉCILE DEFFONTAIN­ES

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