“UNE SIMPLE RÉÉCRITURE DU DISCOURS DE SON PÈRE”
Dans un livre passionnant, Cécile Alduy, professeur de littérature à Stanford, a passé au crible les mots de la candidate du FN grâce à plusieurs logiciels. Derrière un renouvellement de façade, la même idéologie
Marine Le Pen n’évoque plus les « frontistes » mais les « patriotes », que signifie ce changement lexical ? C’est un mot à tiroirs. Il lui sert à désigner les militants, les sympathisants qui soutiennent le mouvement patriote que représente le Front national. En disant « Je demande à tous les patriotes de me rejoindre », elle camoufle le côté partisan du mot tel qu’elle l’emploie. Beaucoup peuvent se reconnaître dans le patriotisme, au sens premier de l’amour de la patrie et de sa défense. Elle installe ainsi une division entre les patriotes et ceux qui ne le sont pas, sous-entendu l’anti-France, mais avec une référence consensuelle. Marine Le Pen excelle à trouver des mots dont l’interprétation dans l’inconscient collectif va être positive. D’où la déclinaison, patriotisme social, patriotisme économique…
Elle parle de « priorité nationale » quand son père prônait la « préférence nationale ». Ce glissement de langage correspond-il à un changement idéologique ?
C’est un phénomène de substitution très intéressant. La « préférence nationale » évoque un choix arbitraire, alors que la « priorité nationale » introduit l’idée d’un leader charismatique capable de faire des choix pour la France. Or, quand on regarde le programme, on retrouve exactement les mêmes mesures que par le passé pour réserver aux citoyens « français », nés de parents français, les logements sociaux, les emplois,