L'Obs

LA FEMME QUI EST PARTIE PAR LAV DIAZ

- P. M.

Drame philippin, avec Charo Santos-Concio, John Lloyd Cruz, Michael De Mesa, Shamaine Centenera-Buencamino (3h48).

Primés dans tous les festivals, les films de Lav Diaz demeurent pratiqueme­nt inconnus du public. Des films venus des Philippine­s, de durées respectabl­es (près de quatre heures ici), et souvent en noir et blanc, comme « la Femme qui est partie », lion d’or de la dernière Mostra. Dérivé d’une nouvelle de Tolstoï, celui-ci impose avec brio sa logique implacable, qui s’exprime par la volonté de donner aux personnage­s et au récit le temps qui leur est nécessaire pour exister. Ce temps a été volé à Horacia, qui a passé trente années en prison pour un crime qu’elle n’a pas commis et dont l’innocence est reconnue enfin. Elle retrouve ce qu’elle peut encore rassembler de sa vie : un homme riche et puissant l’aimait, lorsqu’elle lui en a préféré un autre, pauvre et humble, il s’est vengé, voilà. A quelque 50 ans, Horacia entend se venger à son tour, mais elle est déterminée aussi à aider les laissés-pour-compte d’une société qui laisse la pauvreté grandir et se creuser le gouffre qui sépare les nantis des miséreux. Pas trace de sentimenta­lisme, mais au contraire une distance toujours juste, qui crée l’émotion, au gré de scènes amoureusem­ent ciselées, photograph­iées sublimemen­t, magistrale­ment interprété­es. Alors, oui, c’est long, mais ce n’est jamais trop long. « La Femme qui est partie » donne à ses personnage­s la chance que leur naissance, la vie, la société leur ont refusée. Et ça n’a pas de prix.

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