L’administration a besoin de vous…
L’Etat et les collectivités s’allègent et se transforment. Mais elles ont toujours besoin de cadres. Cap sur les concours!
Déjà mise à rude épreuve par dix années de RGPP (révision générale des politiques publiques), la fonction publique s’apprête à affronter une période mouvementée. 500 000 fonctionnaires en moins pour le candidat François Fillon, un « statut de la fonction publique plus adapté au monde tel qu’il va » pour son challenger Emmanuel Macron… Et pourtant, elle continue à attirer. Avec respectivement 5120 et 2 350 agents de niveau A, autrement dit cadres (hors enseignement) recrutés par concours extérieurs en 2014, l’Etat et les collectivités territoriales constituent même un débouché majeur pour les diplômés du supérieur, notamment dans les filières juridiques, économiques et sociales.
Il faut dire que la « crise » apparente est un peu trompeuse. D’abord parce que la cure d’austérité ne concerne pas les missions régaliennes de l’Etat. Pour preuve: l’Ecole nationale de la Magistrature a triplé son nombre d’auditeurs en six ans. La police recrute de plus en plus de commissaires (aujourd’hui, une quarantaine) et un nombre stable d’officiers (environ 70 par an). Sans oublier la DGSE, qui doit ouvrir ses portes à plus de 800 apprentis-espions (dont une majorité de niveau A) dans les trois ans. Tandis que l’Office français de Protection des Réfugiés et Apatrides (Ofpra) recherche sans cesse de nouveaux officiers instructeurs (niveau master) pour traiter les demandes d’asile.
Ensuite parce que la cure d’austérité, pour être dispensée efficacement sans désorganiser le service public, aura besoin d’experts. C’est particulièrement vrai des services de l’Etat où les recrutements de cadres sont stables (voire en augmentation pour l’ENA) et la sélectivité des concours, en nette baisse depuis dix ans. Ça l’est aussi des collectivités territoriales, malgré une légère rétractation des recrutements, liée à la diminution des dotations de l’Etat et aux réformes territoriales en cours. « Le cadre est plus contraint en termes de moyens financiers, mais le travail n’en est pas moins intéressant. Il faut redéployer les services, et cela demande des compétences en conduite de projets complexes, en management avec les agents, les élus, les usagers », dit Véronique Robitaillie, diplômée de Sciences-Po Bordeaux, ex-directrice générale des services du
département des Côtes-d’Armor et DG adjointe du Centre national de la Fonction publique territoriale. « Le top management ne sera que faiblement affecté par les recompositions en cours », abonde son collègue Christophe Lepage, directeur de l’observatoire de la FPT. « Les postes de cadres intermédiaires seront peut-être en baisse, mais les collectivités continueront à recruter dans le social (enfance, vieillesse, périscolaire), l’aménagement urbain et sur des fonctions stratégiques comme les finances, les RH ou le juridique, particulièrement cruciales en cette période de restructuration. »
L’administration s’adapte aux temps nouveaux. Ce qui ne change pas, en revanche, ce sont les logiques de corps et l’importance du concours. Côté Etat, l’ENA, avec sa quarantaine d’externes, demeure la voie d’accès aux postes de direction au sein des ministères, des préfectures ou des ambassades. Juste en dessous, les cinq Instituts régionaux d’Administration (IRA) forment 350 nouveaux cadres chaque année, recrutés le plus souvent au niveau M2. Intendant en collège, responsable de la billetterie du Muséum d’Histoire naturelle ou chef de l’état civil en préfecture, les postes à pourvoir sont très divers et offrent des rémunérations attractives (3700 euros net par mois en moyenne à l’approche de la quarantaine). Sachant toutefois que les irarques se voient souvent cantonnés aux fonctions dites de soutien (RH, juridique, budgétaire). A moins de s’orienter vers les services déconcentrés de l’Etat. « Si vous faites ce choix, il est possible d’arriver rapidement sur des postes de management – chef de bureau, secrétaire général en sous-préfecture », note Pierre-Henri Vray, le directeur de l’IRA de Lyon.
La fonction publique territoriale connaît la même structuration. Avec le concours de l’Inet pour le corps des administrateurs territoriaux (voués à piloter des collectivités de plus de 40000 habitants) et celui d’attaché, tous les deux ans, pour le gros des troupes. A cela près que la fonction publique territoriale étant sous-dotée en cadres (9% des effectifs), le grade d’attaché permet d’accéder très vite à des responsabilités opérationnelles dans des collectivités de taille moyenne. Les charmes de la proximité. Les profils scientifiques sont aussi recherchés: avec, pour la première fois en 2017, une formation A+ d’ingénieur en chef, ouverte sur concours, afin de proposer des carrières attractives aux diplômés de ces spécialités.