Steinbeck contre Trump
LES ÉTOILES S’ÉTEIGNENT À L’AUBE, PAR RICHARD WAGAMESE, TRADUIT DE L’ANGLAIS (CANADA) PAR CHRISTINE RAGUET, ZOÉ, 286 P., 20 EUROS.
Dans la région des Grands Lacs, un garçon de 16 ans est élevé à l’indienne par un vieil homme. Il a plus appris dans les bois qu’à l’école. Son père, alcoolique en fin de vie, qu’il n’a rencontré que cinq ou six fois, lui demande de venir le chercher : il ne voudrait pas mourir en ville, dans une vallée où règne l’odeur de soufre de l’industrie du papier. Et il a une histoire d’amour à lui raconter… Roman initiatique, si l’on veut. Initiation du fils, du père, et du lecteur. Voyage à travers la vie (la mort) avec une vieille jument. Dialogues frustes. Phrases inachevées plus éloquentes que de longs discours. La nature, irréfutable. L’école de la solitude. De la loyauté. Le respect du mystère. (Les Indiens sont nietzschéens, ou Nietzsche était une espèce d’Indien.) « La terre, elle est là pour nous combler. – J’suis pas très porté à la poésie. – La poésie, c’est rien d’autre que ce que ressentent les hommes. » Richard Wagamese, dont c’est le premier livre traduit en français, est un journaliste canadien, membre de la nation Ojibwée, longtemps liée aux Ecossais (beau mélange). Son roman est un cadeau. En le refermant, on se dit que ce monde n’est pas encore celui de Trump ou des trumpettes de chez nous. C’est toujours celui de Steinbeck – « Des souris et des hommes ». Offrez-vous le voyage : lisez « Les étoiles s’éteignent à l’aube ».