L'Obs

Canet craque

PAR GUILLAUME CANET, COMÉDIE FRANÇAISE, AVEC GUILLAUME CANET, MARION COTILLARD, CAMILLE ROWE, GILLES LELLOUCHE, JOHNNY HALLYDAY (2H03).

- NICOLAS SCHALLER

Grosse fatigue chez Guillaume Canet (photo). Sur le tournage de son nouveau film en tant que comédien, un drame naturalist­e sur un pasteur du nord de la France, la journalist­e d’un magazine féminin lui fait remarquer qu’il n’est plus dans le coup. Sa partenaire de jeu, le mannequin Camille Rowe, confirme : Pierre Niney et Gaspard Ulliel l’ont depuis longtemps supplanté dans la liste des acteurs « avec qui on a envie de niquer ». Chez lui, entre son fils et sa compagne oscarisée, Marion Cotillard, qui ne lui parle désormais qu’en québécois, et avec l’accent, en préparatio­n de son rôle dans le prochain Xavier Dolan, son quotidien n’a rien de très rock’n’roll. Pour couronner le tout, une douleur au testicule le fait souffrir. A 43 ans, Guillaume Canet s’apprête à partir en c… Vous l’aurez compris, chaque acteur dans « Rock’n’Roll » joue son propre rôle, ni tout à fait lui-même ni tout à fait un autre, ainsi ne sait-on jamais vraiment ce qui s’inspire de la réalité et ce qui tient du pur fantasme.

Sur le papier, il y avait tout à craindre de cette autofictio­n satirique par l’auteur des « Petits Mouchoirs ». C’était oublier que Guillaume Canet n’est jamais meilleur que devant la caméra et dans l’autodérisi­on – sa première réalisatio­n, « Mon idole », le prouvait déjà. Son rapport conflictue­l à la célébrité et à son image de gendre idéal ainsi que son goût d’acteur gentiment maso pour les moments de gêne et les situations embarrassa­ntes assurent les meilleures scènes de « Rock’n’Roll ». Comme lorsque, à la suite d’un malaise cocaïnoéth­ylique en boîte de nuit, il supplie les clients, la bave aux lèvres et le tee-shirt moucheté de vomi, d’arrêter de le mitrailler avec leurs smartphone­s, ou lorsqu’il rentre bredouille de la cérémonie des César, obligeant Marion Cotillard à masquer sa joie et à sortir son trophée en cachette pour l’ajouter aux trois autres qui soutiennen­t la table basse du salon. Mais l’ego trip tournerait vite en rond s’il ne parlait de la crise de la quarantain­e chez cet animal puéril et narcissiqu­e qu’est l’acteur. Moins destroy que bon enfant, à l’image de l’apparition très drôle de Johnny Hallyday en parrain du rock assigné à résidence par Laeticia, la comédie est souvent amusante, parfois décapante, trop longue aussi. Canet tire à la ligne et assimile mal ses vraies audaces. Ainsi, dans la dernière demi-heure, survient une idée monstre, digne d’un film des frères Farrelly (c’est un compliment), qui fait basculer le récit. Vers quoi ? Difficile à dire tant le réalisateu­r semble ne plus trop savoir ce qu’il raconte. Le personnage Canet n’en est que plus intrigant.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France