L'Obs

Le dictionnai­re amoureux d’Albin

L’UN DE NOUS, PAR ALBIN DE LA SIMONE (TÔT OU TARD).

- SOPHIE DELASSEIN

Nous n’avions guère de ses nouvelles depuis « Ici-bas, ici même », le disque de Miossec dont il avait signé les arrangemen­ts en 2014. Partout le Brestois chantait les louanges d’Albin de la Simone, 46 ans, acteur discret de la nouvelle scène française, très applaudi par la critique comme l’un des fils spirituels d’Alain Souchon – ascendance assumée dès 2003, quand Albin conviait son aîné à chanter « Patricia » sur son premier album. « L’Un de nous », son cinquième, reste dans cette veine : subtile, intimiste, introspect­ive. On peut déplorer le manque de caractère de la voix. On peut regretter qu’il y soit beaucoup (trop) question d’amour. Mais c’est si joliment exprimé. Le public, cette foule résolument sentimenta­le, sera toujours preneur de grands sentiments sur un lit de cordes.

Ça commence avec « le Grand Amour », quelques notes au piano pour une aventure au coeur d’une forêt. C’est l’amour fou ou plutôt son contraire, puisqu’en quelques minutes il s’échappe, escorté dans sa fuite par des violons pleins de mélancolie. Rien de renversant jusque-là, on en redemande pourtant, pris par le charme de l’ensemble. Et des amours, on en rencontre d’autres. L’amour mûr (« Une femme »), l’amour-amitié (« A quoi »), l’amour sur la fin (« l’Un de nous »), l’adultère guilleret (« A midi on m’a dit ») et son corollaire : le divorce (« Embrasse ma femme »). Mais Albin de la Simone n’est-il pas meilleur quand il sort un peu de cette thématique-là, qui fleurit chez lui comme un marronnier? On le préfère, en e et, quand il refait le monde de nos nombreuses tergiversa­tions avec « Dans la tête » ou trace le portrait d’un homme un peu à côté de ses pompes. Meilleur encore, et même émouvant, quand il décrit de l’intérieur un « Ado » type, en panique dès qu’on le prive d’une connexion wi-fi. Enfin, on l’espérait, la grande chanson du disque arrive : le piano dessine une ballade, et Albin de la Simone chante « la Fleur de l’âge », lent déclin d’un homme qui compte ses hivers et qu’on imagine une verveine à la main. Déjà vieux et curieuseme­nt heureux de l’être. A l’arrivée, on se fiche un peu que la voix ne soit pas assez typée ; on a entendu des chansons très bien écrites et d’une sensibilit­é rare.

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