L'Obs

D’UNE CAMPAGNE L’AUTRE

Avec la baisse des prix, les maisons de vacances font de nouveau rêver. Le besoin de grand air et d’espace, à la mer, à la montagne ou au vert, finit de convaincre les citadins

-

On les disait démodées, coûteuses, massacrées par la réforme des plus-values de 2012, vouées à la casse ou à l’abandon. Les résidences secondaire­s n’étaient plus dans l’air du temps. Avec la baisse des prix et des taux, elles font à nouveau rêver. « Il y a un vrai regain d’activité depuis 2016 », remarque Laurent Demeure, président de Coldwell Banker France & Monaco. La maison de campagne était la plus menacée par cette déshérence des résidences secon- daires. On redécouvre aujourd’hui ses vertus, y compris près de la capitale ou de Lyon. « Beaucoup de jeunes parents veulent s’évader de Paris et emmener leurs enfants le week-end dans une maison de campagne. On trouve à 100 kilomètres de Paris de jolies maisons typiques, de 200 m2, en bon état avec du terrain et une piscine, de 250000 à 350000 € », explique Gaetan Mouquet, directeur de l’agence Mouquet à Evreux. Dans de nombreuses régions de France, des affaires sont possibles. « Les prix ont atteint des niveaux attrayants pour les Français comme pour les étrangers. S’ajoute à cela un phénomène sociétal. D’un côté la nature, le bien-être, l’espace ; de l’autre, la pollution, la réduction des mètres carrés, le stress souvent lié aux villes, explique Patrice Besse, directeur de l’agence du même nom, spécialisé­e en biens de caractère. De nombreux villages et petites villes font des efforts importants de présentati­on sur le plan architectu­ral et culturel. L’exode rural n’est pas une fatalité, le faible coût des mètres carrés et les nouveaux modes d’exploitati­on commercial­e de certains bâtiments (espaces de coworking, résidences d’artistes, permacultu­re…) rendent possible une nouvelle vie à la campagne. » Les transactio­ns les plus nombreuses se situent entre 300 000 et 1,2 million d’euros.

A l’inverse, le marché des châteaux a souffert. « Les baisses de prix sont spectacula­ires, parfois de 50 % depuis 2008 », explique Nicolas Devic, directeur de l’agence Mercure Rhône-Alpes. En Isère, un château est ainsi passé de 2 millions à 1 million d’euros en cinq ans. Certaines propriétés sont depuis trois ou quatre ans sur le marché. De belles demeures qui valaient 700000 ou 800000 € il y a quatre à cinq ans sont tombées à 600 000 € aujourd’hui. « Ceux qui ont acheté en haut du marché ne retrouvero­nt pas leur mise, notamment s’ils ont fait des travaux qualitatif­s. Mais il redevient raisonnabl­e de s’offrir une résidence secondaire à une heure de Lyon, aujourd’hui. » Plus au sud, la Provence est à nouveau recherchée par des acquéreurs français, mais aussi anglais, autrichien­s, hollandais, belges, australien­s et américains. Et, notamment, la Drôme, première destinatio­n TGV en venant de Paris, où il dépensent « entre 600000 et 1,2million d’euros pour une belle propriété », note Françoise Dessoy, de l’agence Campagnes du Soleil à Montélimar. Maisons d’hôte et gîtes continuent d’être une motivation d’achat… pour qui a la fibre hospitaliè­re. Dans la Drôme des collines, à 1 heure de Lyon, une maison joliment rénovée avec une partie en gîtes s’est vendue 556 000 €… au lieu des 800 000 espérés. Le Luberon, même s’il est moins à la mode que dans les années Mitterrand, séduit toujours et reste cher. « Paradoxale­ment, les transactio­ns se font plus vite dans le haut de gamme que sur le marché intermédia­ire (de 800 000 à 2,5 millions d’euros) dans lequel on trouve plus de biens à la vente », explique Emmanuel Garcin, de l’agence Emile Garcin à Ménerbes. Le marché des Alpilles et d’Avignon est toujours actif, mais cher lui aussi, avec des propriétés qui vont de quelques centaines de milliers d’euros à plus de 10 millions d’euros. Un beau mas à restaurer à Maussane-les-Alpilles peut valoir de 1 à 1,7 million d’euros. Dans le Gard, du côté d’Uzès et des Cévennes, il faut compter de 300 000 à 500000 € pour une maison de 150 à 250 m² habitables avec jardin et piscine dans un village préservé. Mais les grandes propriétés situées dans un environnem­ent de qualité, à 1 heure de Montpellie­r ou de Nîmes, se négocient entre 700 000 et 2 millions d’euros. En matière de résidences secondaire­s, le littoral garde une cote élevée à Deauville, La Baule ou Biarritz. « Il y a beaucoup de transactio­ns autour du million d’euros. On achète aussi pour une future retraite », remarque Laurent Demeure. On y trouve des perles qui laissent rêveur. En Bretagne, dans l’ensemble, les acheteurs sont français, surtout parisiens, explique Joanna Chaboud, chez Emile Garcin. Ils cherchent des maisons entre 450000 € et 1,4 million d’euros. Fait nouveau depuis ces quelques dernières semaines, des acquéreurs venus du sud de la France manifesten­t le souhait de s’installer en Bretagne. Dans le Finistère, remarque Françoise Kirkam, de l’agence Côté Mer Côté Jardin à Locquirec, « on trouve de jolies maisons avec vue sur mer à partir de 300 000 € ». Dans le golfe du Morbihan, une île privée et son fortin Vauban édifié en 1748, avec un jardin de 3000 m2 clos de remparts, s’est vendue 1,9 million d’euros. Sur la côte Atlantique, dans d’autres belles stations, la rareté se paie tout aussi cher. A Royan, une propriété sur la plage est partie à 3 millions d’euros. Au Pyla-sur-Mer, selon Sotheby’s Internatio­nal Realty, une propriété en première ligne sur le bassin d’Arcachon, de 360 m2 sur 2 000 m2 de terrain, s’est négociée 4,680 millions d’euros. Le marché de la Côte d’Azur est lui aussi reparti après avoir subi le contrecoup de l’attentat du 14 juillet. « Le marché locatif a été impacté, les gens se sont reportés sur d’autres pays comme l’Espagne. Mais le dernier trimestre a été plus dynamique », remarque Sylvain Boichut, directeur commercial du groupe John Taylor. A Cannes, les jeunes fortunes du Qatar sont revenues. La Croisette ne perd pas de son aura : de 25 000-30 000 €/m2 à rénover jusqu’à 45000-50000€/m2 pour un dernier étage flambant neuf. A SaintTrope­z, « il y a une reprise sur le très haut de gamme, pour des biens parfaiteme­nt refaits », explique Sylvain Boichut. Des sociétés spécialisé­es dans la rénovation haut de gamme les achètent et les rénovent, réalisant de fructueuse­s opérations. Le coeur du marché se situe entre 3 et 6 millions d’euros.

 ??  ?? Le village de Domme, en Dordogne.
Le village de Domme, en Dordogne.

Newspapers in French

Newspapers from France