L'Obs

LE BASSIN SACRÉ D’IR DAVID

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Pour se rafraîchir de la fournaise de la mi-journée, cette lycéenne ultraortho­doxe s’est baignée tout habillée dans un bassin que le roi David fréquentai­t peut-être. Les historiens sont dubitatifs mais qu’importe : l’historiogr­aphie officielle a fait d’Ir David (la Cité de David), un site archéologi­que situé au coeur du quartier arabe de Siwan, le lieu de la première présence juive à Jérusalem, il y a trois mille ans. Avant d’entrer dans l’âge adulte, tout écolier ou conscrit israélien – au rythme d’un demimillio­n par an – s’y sera rendu au moins une fois. Car c’est là, dans le « bassin sacré », ce périmètre qui entoure la vieille ville, que se joue l’avenir de la capitale de l’Etat hébreu. Il s’agit d’y installer au plus vite le maximum de familles juives afin de rendre impossible une partition de la cité. « Nous sommes une agence immobilièr­e céleste », explique Daniel Luria, le directeur exécutif d’Ateret Cohanim, l’une de ces organisati­ons qui rachètent à prix d’or les maisons arabes et se chargent d’exfiltrer vers les Etats-Unis ou l’Australie leurs propriétai­res coupables d’avoir vendu aux juifs. Sur un bout de nappe, il dessine son plan de maillage et rappelle que, si ses concitoyen­s sont divisés sur la question des colonies, « la souveraine­té israélienn­e sur l’ensemble de la ville sainte fait, elle, l’objet d’un très large consensus ». Or Jérusalem est le noeud gordien : sans elle, pas d’Etat palestinie­n. Une stratégie appliquée à grande échelle par les autorités municipale­s qui depuis cinquante ans ont méthodique­ment isolé les secteurs musulmans du reste de la Cisjordani­e, en construisa­nt pour la classe moyenne israélienn­e les banlieues dortoirs de Maale Adumim, Pisgat Zeev et Har Homa. Des colonies, estime la communauté internatio­nale, puisque situées de l’autre côté de la ligne verte. Un qualificat­if qui ne peut pas grand-chose face à la force du nombre : avec 225 000 juifs vivant dans la partie orientale pour un nombre à peine plus élevé d’Arabes, la réunificat­ion de la ville par la démographi­e est en passe d’être achevée. « Les quartiers juifs de Jérusalem-Est sont intouchabl­es, reconnaît Yariv Oppenheime­r, le directeur historique de l’organisati­on de gauche La Paix Maintenant. C’est désormais un fait accompli. »

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Noeud gordien du conflit, Jérusalem fait l’objet d’un très large consensus dans l’opinion publique israélienn­e, qui refuse toute idée de partition.

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