Le saint patron de Rome
Après avoir rénové à grands frais la fontaine de Trevi, Fendi installe face à son siège romain une oeuvre monumentale de l’Italien Giuseppe Penone. Une opération qui consolide son aura de mécène
Lentement, les panneaux blancs posés sur des roulettes dévoilent une partie, puis la totalité de l’oeuvre. Intitulée « Foglie di Pietra », littéralement « Feuilles de pierre », elle est constituée de deux immenses arbres en bronze. Sur les branches ont été déposés de gros blocs de marbre taillés, qui semblent venir d’un bâtiment antique. Ils donnent l’impression de pouvoir tomber à tout moment. Les symboles sont là. Lisibles aisément. Il y a la nature et la ville, le passé et le futur.
Ce ne sont pas les premiers arbres du célèbre artiste piémontais Giuseppe Penone, maître de l’arte povera. Il avait déjà planté ailleurs ses sculptures, qui se jouent de la gravité, notamment à Versailles, en 2013. Ici, les réalisations di èrent par ce qu’elles sont, mais aussi par ce qu’elles véhiculent. Car, outre sa valeur esthétique, « Foglie di Pietra » est une première. Jamais aucune oeuvre éphémère n’avait été mise en place dans les rues de Rome. La ville musée regorge de merveilles architecturales, mais nulle installation ne se dressait dans ses rues jusque-là.
Ce n’est pas à la ville, déjà bien en peine de restaurer ses bâtiments anciens, mais à Fendi que l’on doit ce geste. « Notre histoire est liée à celle de Rome, c’est
pourquoi nous tenons depuis plusieurs années à renforcer nos liens avec la ville », explique Pietro Beccari, PDG de la marque. C’est déjà Fendi qui y a fait rénover six fontaines, dont la mythique fontaine de Trevi, où elle avait obtenu l’autorisation, en juillet dernier, d’organiser le défilé de ses 90 ans. Le mécénat privé a aussi ses bonnes contreparties…
Le travail de Penone n’est d’ailleurs pas installé n’importe où, mais face au magnifique immeuble du Palazzo della Civiltà Italiana, devenu le Palazzo Fendi depuis sa rénovation par la maison, qui y a établi ses bureaux. Le premier étage de ce bâtiment surnommé le Colisée carré, à l’architecture mussolinienne, est ouvert gratuitement au public et abrite jusqu’au 16 juillet prochain « Matrice », une exposition consacrée au travail de Giuseppe Penone. On y redécouvre des oeuvres anciennes, vastes hommages à la nature comme « Sou e de feuilles », un amas de feuilles recouvert de bronze, dans lequel on devine la trace d’un corps. En o rant à Rome, ses habitants et ses touristes, sa première oeuvre in situ, Fendi réalise un coup – de pub – de maître.