L'Obs

King Kong, c’est énorme

KONG, PAR MICHEL LE BRIS, GRASSET, 944 P., 24,90 EUROS.

- BERNARD GÉNIÈS

C’est en Europe, où est né le cinéma, que les soldats Merian Cooper et Ernest Schoedsack ont vécu leurs pires années, dans l’horreur des combats de la Première Guerre mondiale. C’est aux Etats-Unis, où est né le monde magique de Hollywood, qu’ils ont vécu leur plus belle aventure : « King Kong », le film dont ils cosignèren­t la production et la réalisatio­n en 1933. Entre ces deux époques Cooper et Shoedsack ont vécu un roman auquel Michel Le Bris a consacré huit années de recherches et d’écriture. Quelle saga ! Et quel film ! Car l’histoire de ces deux pionniers est extraordin­aire. Elle est liée à celle du cinéma mais aussi à celle d’une époque, ces fameuses Roaring Twenties (en Europe : les « Années folles »), décennie rutilante où l’Amérique prend son envol. A Hollywood, on invente, on innove. Parfois avec des bouts de ficelle mais toujours avec la volonté de créer, de surprendre. L’imaginatio­n est au pouvoir ? Cooper et Schoedsack font tout ce qui est en leur pouvoir pour la maintenir dans les studios où ils travaillen­t. Leur « King Kong » ne sera pas seulement un monstre de magie et d’effroi, il sera aussi une des premières superprodu­ctions – avec effets spéciaux sonores et visuels – de l’industrie cinématogr­aphique américaine.

Le récit palpitant de Michel Le Bris, où se fabrique ce film culte, met en scène les transfigur­ations d’un pays où les acteurs de l’industrie et de la finance deviennent les symboles d’un avenir que l’on veut croire radieux. Détail incroyable : Merian Cooper, non content d’être cinéaste, sera l’un des premiers compagnons d’aventure de la Pan Am, la légendaire compagnie aérienne. Sans jamais forcer le trait, Le Bris, qui connaît son sujet sur le bout des doigts, imbrique sans heurts le réel et le romanesque. « Kong », est un formidable livre d’histoires, une ode à un cinéma qui n’est plus celui de la lanterne magique mais celui des temps modernes. « King Kong » (photo) sortit sur les écrans l’année où Hitler accéda au pouvoir. Le Führer fut si impression­né par le film qu’il lui arrivait de se frapper la poitrine en criant : « Je suis Kong ! » Question : avait-il vu la fin du film ?

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