Pink Rock
DEDICATED TO BOBBY JAMESON, PAR ARIEL PINK (THE ORCHARD)
Ariel Pink connaît son histoire de la pop comme un encyclopédiste ou comme un guide conférencier. Tout se passe comme si son nouveau disque perpétuait le geste et l’esprit virtuose, oecuménique et pasticheur de Todd Rundgren, période « Something/Anything » (1972). Ariel lave plus pink. Comme à la demande, le Californien postmoderne s’y entend pour vous usiner des chansons qui s’enracinent dans les traditions bien répertoriées du rock, de l’hypnagogique au bubble-gum ou au folk psychédélique à la Syd Barrett (« Do Yourself a Favor »). Son sens capiteux du refrain sucré lui facilite la tâche. Dans le morceau qui donne son titre à l’album, « Dedicated to Bobby Jameson » (star californienne des années 1960 et figure maudite, Bobby Jameson se retrouva bien vite ruiné, alcoolique, SDF, et s’éteignit à 70 ans en 2015), Pink pousse la désinvolture jusqu’à piller les Doors et la fameuse fugue instrumentale de « Light My Fire », le tout dans les étroites limites d’une chanson de trois minutes cinquante. Dans le titre suivant, « Time to Live », comme on cite son poète préféré, il reproduit sans vergogne, au moment où on s’y attend le moins et dans un pandémonium de guitares glam rock, la mélodie vocale de « Video Killed The Radio Star » des Buggles. Parmi les autres séductions de ce disque charmeur, on notera aussi le soin artiste que Pink met à renouveler les sonorités et les textures de ses claviers, telle une femme de dictateur qui collectionnerait les escarpins.