Les amis de Knausgaard
BIENVENUE EN AMÉRIQUE, PAR LINDA BOSTRÖM KNAUSGAARD, TRADUIT DU SUÉDOIS PAR TERJE SINDING, GRASSET, 128 P., 15 EUROS. HISTOIRE D’UN MARIAGE, PAR GEIR GULLIKSEN, TRADUIT DU NORVÉGIEN PAR JEAN-BAPTISTE COURSAUD, BUCHET-CHASTEL, 204 P., 19 EUROS.
Est-ce que tous les auteurs scandinaves qui nous arrivent désormais ont un rapport avec Karl Ove Knausgaard ? C’est au moins le cas de Linda Böstron Knausgaard, l’ex-épouse du romancier à succès, et Geir Gulliksen, son éditeur, dont les ouvrages sont traduits pour la première fois en France. La première se trouvait au centre d’« Un homme amoureux », le deuxième tome de « Mon combat », somme autofictionnelle et micro-détaillée. Dans « Bienvenue en Amérique », elle adopte le contre-pied du style du père de ses quatre enfants, choisissant l’allusif et la brièveté. Ici, Ellen, 11 ans, n’adresse plus la parole à personne, ni à sa famille ni à ses camarades de classe depuis la mort de son maniaco-dépressif de père. En elle, qui a ardemment désiré ce décès, se joue un déchirement entre la culpabilité et le vide immense. Son frère, lui, cloue la porte de sa chambre pour s’isoler. Seule sa mère, une actrice, tente de surjouer la famille « lumineuse ». Ellen décrit le monde autour d’elle avec clairvoyance et noirceur, surtout quand il s’agit de mesurer le poids de la maladie paternelle sur les autres. Un récit acerbe, qui peine parfois à convaincre qu’il est à hauteur d’enfant.
Dans « Histoire d’un mariage », le noyau familial vacille aussi. Entre Jon et Jiminy, ce fut l’évidence. Mais ça ne devait durer que vingt ans et deux enfants. Un jour, Jiminy a commencé à s’intéresser d’un peu trop près à un collègue. Que s’est-il passé ? Jon remonte le fil, passant en revue les moments clés de leur relation : « Nous avons existé, autrefois. » Geir Gulliksen livre une chronique épatante de la vie et la mort d’un couple. Avec une franchise qui irradie, il dissèque la façon dont les émotions se forment, notamment le doute qui s’instille entre deux êtres qui s’aiment profondément. En restituant la vérité nue, aussi désagréable soit-elle, il fait preuve d’un flair implacable. Mais pouvait-il en être autrement de l’homme qui a découvert Karl Ove Knausgaard ?