La playlist des albums de l'été
Électro hybride, rock trépidant ou pop cinq étoiles, les pointures de la scène internationale livrent leurs nouveautés. Sélection des meilleures sorties de la saison.
Girl punk power
Pour ceux qui doutent encore des qualités musicales de Beth Ditto, qu’ils écoutent illico presto son premier album solo. Riffs rock métalliques soulignés de paroles insolentes, une voix qui n’a pas besoin de forcer pour imposer sa puissance… On reconnaît là les marques de fabrique de feu son groupe Gossip. Logique, donc, qu’elle ait souhaité voler de ses propres ailes, offrant une ribambelle de morceaux taillés pour le live, son terrain de jeux préféré. Impossible de ne pas danser sur Fake Sugar, ode à la liberté d’être ce que l’on veut, sur fond de pop ouverte à tous les âges et tous les genres. Le tube: Savoir-faire, imparable manifeste rock discoïde, à écouter après le déjeuner pour booster son après-midi. Beth Ditto, “Fake Sugar” (Columbia).
Euphorie
Il y a vingt ans, qui aurait cru que Phoenix, bande de grands timides, allait assurer la facette la plus pop de la French Touch ? Témoignant de sa facilité mélodique et de sa fausse légèreté,
Ti Amo renoue avec le synthétique excitant des débuts. Il convoque même la langue française ici et là… Avec les bijoux euphorisants comme J-boy ou Goodbye Soleil, Phoenix va encore enchanter les stades.
Le tube: Tuttifrutti, à écouter le matin, en guise de vitamine C. Phoenix, “Ti Amo” (Atlantic/warner).
Épure excentrique
Fascinante pour les uns, agaçante pour d’autres, Camille est une chanteuse réputée pour son excentricité qui ne laisse personne indifférent. Après le conceptuel Ilo Veyou (2011), la voici enfin de retour avec son meilleur disque à ce jour, OUÏ. Imaginé dans une auguste bâtisse provençale du xiie siècle, il distille une chanson majoritairement française, inclassable et épurée. Sur fond pop, des échos soul ou électro habillent la voix singulière de Camille, autour de laquelle elle s’offre des variations inédites. Elle met aussi la danse à contribution, en imaginant une gestuelle dédiée. À ce renouveau rafraîchissant, exigeant et dans l’air du temps, on dit oui ! Le tube : Je ne mâche pas mes mots, pour ses variations rythmiques et mélodiques, à écouter lors d’un bel après-midi. Camille, “OUÏ” (Because).
Énergie virtuelle
À la fin des années 1990, le chanteur de Blur, Damon Albarn, et l’illustrateur du comics Tank Girl, Jamie Hewlett, se retrouvent à partager le même appartement londonien, où ils allient leurs talents via le concept musicovisuel de Gorillaz. Carton plein ! Mais depuis The Fall (2010), on ne savait pas vraiment si le groupe animé le plus célèbre du monde allait reprendre du service… Ouf,
Humanz prouve aujourd’hui que le duo gagnant n’a pas dit son dernier mot, s’octroyant le luxe d’inviter Grace Jones, De La Soul ou Noel Gallagher. Si on peut d’abord être surpris par cet enchaînement de titres mêlant sans tri toutes les influences de Gorillaz (hiphop, dancehall ou punk), on se laisse vite prendre par son énergie décoiffante.
Le tube: Momentz, un hiphop ultra-up tempo avec De La Soul, à écouter pendant l’apéro pour bien débuter la soirée. Gorillaz, “Humanz” (Parlophone/warner).
Élégance de l’écriture
Il a fallu attendre cinq ans depuis Toutes directions, son dernier album studio, pour écouter les dix-neuf nouveaux titres de Bertrand Burgalat. Entre-temps, il n’a pas chômé : des sorties essentielles sur son label Tricatel (de Chassol à Michel Houellebecq), un livre, Diabétiquement vôtre (où il raconte sa maladie avec une sincérité saisissante), une existence hautement créative avec sa compagne Vanessa
Seward… Vitaminé par des échos électro, funk ou bossa nova, Les Choses qu’on ne peut dire à personne est la preuve de la belle écriture ourlée de Burgalat, décidément l’un des surdoués de la chanson français actuelle.
Le tube : Ultradevotion pour son élégance groovy, à écouter en fin de journée, entre chien et loup. Bertrand Burgalat, “Les choses qu’on ne peut dire à personne” (Tricatel)
Expérimentations tout public
Après un premier album épatant, An Awesome Wave, et un second moins convaincant,
This Is All Yours, Alt-j, groupe de Leeds couronné d’un Mercury Prize, ne pouvait gâcher sa troisième chance. Rassurons-nous, grâce à Relaxer, il revient à ce qu’il sait faire de mieux : un pop-rock indie à tendance tribale, cérébral et qui pourrait s’avérer franchement tubesque si Alt-j ne persistait à refuser une production mainstream. Mais c’est pour cette raison que l’on aime passionnément ce groupe sachant rendre accessible sa musique expérimentale, où l’on peut passer d’une ballade méditative (Adeline) à une pop protéiforme (Deadcrush).
Le tube : In Cold Blood à l’imparable foisonnement orchestral, à écouter la nuit tombée. Alt-j, “Relaxer” (Infectious Music/pias).
Système solaire
Planetarium est la dream team la plus impressionnante de l’été. Autour de Sufjan Stevens, l’américain folkeux à la voix céleste qu’on ne présente plus, s’activent le batteur James Mcalister, le guitariste de The National Bryce Dessner et l’éminent compositeur de musique minimaliste Nico Muhly. Après des années de réflexion sort enfin leur oeuvre collective. Son but : offrir au folk une vision à la fois synthétique et baroque, quasi spatiale. De Neptune à Mercury, le système solaire est exploré par Stevens au long de ces dix-sept morceaux à la fois indie et ultra-accessibles. Trippant !
Le tube : Jupiter, ou quand le folk contemplatif invite l’autotune, à écouter avant de dormir, lors d’une nuit étoilée. Planetarium, “Planetarium” (4AD).