Business : Frédérique Bredin.
EX-MINISTRE, LA PRÉSIDENTE DU CENTRE NATIONAL DU CINÉMA (CNC) VEILLE SUR L’INDUSTRIE CINÉMATOGRAPHIQUE FRANÇAISE.
Une heure de réveil ? C’est très variable. Dans le monde du cinéma, les journées se prolongent : festivals, avant-premières, négociations... Le pitch de votre poste ? Comme le dit Cédric Klapisch : « Le CNC, c’est une maison qui crée de la création. » Concrètement, il s’agit de soutenir tous les métiers de cette industrie : financer les films, accompagner les jeunes talents, restaurer les oeuvres du patrimoine, moderniser les salles, promouvoir la diffusion, investir dans le numérique, défendre nos intérêts à Bruxelles... Les taxes dites YouTube et Netflix, qui serviront à financer la création audiovisuelle en France, ont représenté trois ans de combat.
Des résultats à donner ici et maintenant ?
Le cinéma français est le premier d’Europe en termes de production, de fréquentation, d’exportation et de nombre de salles – toutes numérisées avec l’aide du CNC. Il représente presque 1% du PIB et 340 000 emplois.
Nous avons poussé des mesures fortes : le crédit d’impôt pour relocaliser les tournages en France et attirer les productions étrangères, la création d’un fonds de soutien pour la réalité virtuelle. Notre système est autofinancé grâce aux taxes sur les diffuseurs (salles de cinéma, chaînes TV, services de VOD, ventes de DVD...). C’est l’argent du cinéma qui va au cinéma.
Des défis pour demain ? De nouvelles formes de création et d’usage émergent à toute allure : écritures, formats, jeux vidéo, réalité virtuelle, films pour mobiles... À nous de les accompagner et d’en maîtriser les enjeux.
S’il faut remonter à l’origine ? Je rêvais d’être comédienne, mais j’ai été recalée au Conservatoire... J’ai fait l’ENA (promotion Voltaire) en me jurant de me consacrer à la culture et aux arts. En 1984, à 28 ans, j’ai rejoint le cabinet de Jack Lang, en charge du cinéma.
Un mentor ? François Mitterrand (dont elle devient conseillère à la Culture en 1986). Il avait cette volonté de mettre le pied à l’étrier aux jeunes – et aussi aux femmes. Il m’a encouragée à m’engager en politique et à me battre pour défendre mes idées. En 1988, j’ai été élue députée, puis maire de Fécamp un an plus tard, avant d’être nommée en 1991 ministre de la Jeunesse et des Sports dans les gouvernements d’Édith Cresson et de Pierre Bérégovoy.
Un changement de cap ? En 2000, à 44 ans, j’ai démissionné de mon mandat de députée pour prendre en charge la stratégie des médias dans le groupe Lagardère. Passer du public au privé était alors très rare, et croiser ces expériences a été pour moi très enrichissant. Accéder, en 2013, à la direction du CNC a été un aboutissement.
Votre définition de l’influence ? Le soft power : exporter le cinéma, c’est véhiculer des valeurs par les images. Nous accueillons ceux qui n’arrivent pas à tourner dans leur pays et aidons les cinémas du monde : la défense des libertés est au coeur de l’exception culturelle française.