ADÈLE VAN REETH, philosophe *
“UN INCROYABLE FESTIN ÉMOTIONNEL”
Comme on mange on aime... « Si la jouissance alimentaire et sexuelle révèle notre rapport au monde et aux autres, jouir ne va pas de soi. Il ne suffit pas de le décider, de le vouloir pour y parvenir. “Il faut une rare vocation pour être un jouisseur”, affirmait Albert Camus. Aussi bien à table qu’au lit, cela s’apprend. C’est se rendre attentif à la place que l’on accorde au plaisir dans sa vie. Jouir est même un geste de liberté individuelle, qui fait sauter nombre de déterminismes et de conditionnements sociaux. Quand je suis amoureuse, on peut me mettre du caviar sous le nez, je ne le sentirai pas. Même si, à table, on ne se touche pas, il y a une dévoration de tous les sens. Je suis attentive à chaque mouvement de sourcils, à l’odeur de l’autre, au grain de sa peau, à la forme de ses mains. Pour moi, le repas devient alors accessoire. Le corps est absorbé par celui de l’autre. »
Comme on aime on dévore...
« Dans les moments les plus torrides, j’en oublie de manger, tant je suis submergée de sensations ! Je jouis de la présence de l’autre. C’est un incroyable festin émotionnel. Certains plaisirs sont parfois si intenses qu’ils prennent la place de tous les autres… Jusqu’à ce que je réalise tout d’un coup que je meurs de faim. Mon plaisir ultime est alors de savourer un excellent camembert accompagné d’un très bon bourgogne (un nuits-saintgeorges, par exemple) et d’un bon pain, moelleux à l’intérieur et croustillant à l’extérieur. Pour moi, c’est une nouvelle extase. »