Héroïnes en série »,
J’ai lu dans une étude du CSA qu’un personnage de série sur deux est une femme. Oublions qu’elle incarne plus souvent qu’à son tour un rôle secondaire, car l’essentiel n’est pas là. Ce que l’on observe et qui mérite notre attention, c’est d’abord une certaine appropriation par les héroïnes de séries des archétypes masculins. Sans rien renier de sa féminité, l’adjointe de Kepler (série « Kepler(s) » que l’on découvrira sur France 3 l’hiver prochain) excelle dans l’art de la riposte physique. D’autres se distinguent dans celui de la course-poursuite, tandis que, dans les séries norvégiennes, les hackers sont des hackeuses. À travers le regard de ces nouvelles héroïnes, les séries rendent également mieux compte qu’auparavant de la diversité de la condition féminine. Dans « Big Little Lies », Nicole Kidman joue une femme battue dans un milieu bourgeois. Dans « Come Home », l’héroïne craque et délaisse mari et enfants. Dans la série israélienne « Harem », des femmes choisissent librement de rejoindre une secte où elles partagent le même homme. Et dans « An Ordinary Woman » (série russe en compétition officielle cette année au festival Séries Mania*) se bat sur tous les fronts une mère fleuriste qui trempe dans le proxénétisme pour boucler ses fins de mois. Ici et là, l’empathie est convoquée : on suit ces femmes, on adhère à leurs combats, rien n’est simple, monolithique, à l’écran comme à la ville. Julianna Margulies, l’héroïne de « The Good Wife » et l’interprète de Carol Hathaway dans « Urgences », que j’avais invitée l’an dernier à Séries Mania, remarque que « les femmes, grandes consommatrices de séries, attendent des personnages féminins complexes ». Cette immense star, qui déambule incognito en jean et pull à Paris, s’attache d’ailleurs dans chacun de ses rôles à en saisir la portée politique. Un modèle pour nous toutes.