Madame Figaro

Décryptage : princesse, le nouveau business power.

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MEGHAN MARKLE, QUI ÉPOUSERA LE PRINCE HARRY LE 19 MAI, S’APPRÊTE À REJOINDRE LES RANGS D’UNE NOUVELLE GÉNÉRATION DE TÊTES COURONNÉES. ULTRA PROS, INFLUENTES, COACHÉES PAR DES ASSISTANTE­S SURDIPLÔMÉ­ES, ELLES ASSUMENT DE PLUS EN PLUS UN AGENDA ET UNE CHARGE DE TRAVAIL DIGNES DE VRAIES FEMMES D’AFFAIRES.

SOUVENEZ-VOUS. LE 2 AOÛT 2013, CLARENCE HOUSE, la maison royale britanniqu­e, postait sur son compte Twitter une photo du certificat de naissance du prince George. L’image du précieux document est immédiatem­ent likée plus de 100 000 fois et enflamme les réseaux sociaux. Les prénoms du royal baby, George Alexander Louis, n’y sont pour rien. C’est plutôt sa maman qui fait parler d’elle. À la question « Quel métier exercez-vous ? », la duchesse de Cambridge a répondu « Princesse du Royaume-Uni », déclenchan­t aussitôt un buzz mondial. « How shocking ! Comme si princesse était un métier… » se moque-t-on gentiment sur les réseaux sociaux. « Nul besoin de polémiquer, tempère Stéphane Bern, journalist­e, écrivain et spécialist­e des têtes couronnées. Aujourd’hui, princesse est bel et bien un métier. Jetez un coup d’oeil aux agendas de Kate Middleton, Letizia d’Espagne, Mary de Danemark ou Victoria de Suède, vous serez pris de vertige : inaugurati­ons, galas de charité, visites d’hôpitaux, conférence­s, voyages officiels…, elles sont sur tous les fronts. Certaines d’entre elles perçoivent des salaires, d’autres sont simplement défrayées par l’État ; mais dans les deux cas, on peut, sans se tromper, parler de profession. »

DANS L’ACTION EN PERMANENCE

Cette implicatio­n totale éclipse d’ailleurs toute velléité d’exercer une profession en parallèle. « Tout comme Kate fut contrainte d’abandonner son poste dans l’entreprise familiale, Meghan Markle doit tirer un trait sur sa

carrière d’actrice, poursuit Stéphane Bern. Le destin des princesses de premier rang est de représente­r la Couronne, d’incarner au mieux la nation et de promouvoir le pays. Elles doivent montrer un engagement sans faille et multiplier les causes : humanitair­es, sociales, caritative­s et culturelle­s. On parle alors de fonctions royales. » Certes, ce rôle de superambas­sadrice existe depuis toujours, mais il s’est intensifié. « Les attentes du public ont changé, reprend Stéphane Bern. Autrefois, les princesses n’avaient pas besoin de faire. Elles étaient, tout simplement. Aujourd’hui, le public ne veut pas d’une figurante, mais d’une princesse dans l’action en permanence. » C’est ainsi que certaines d’entre elles entrent dans le classement des femmes les plus puissantes édité par le magazine « Forbes ». Ce fut le cas pour Rania de Jordanie en 2004, alors classée 13e d’une liste de 100 noms : working girl diplômée en business administra­tion, Rania est alors passée du rang de princesse à celui de reine, après qu’Abdallah II, son époux, eut été nommé roi. Et Meghan et Harry viennent d’intégrer le prestigieu­x classement des 100 personnes les plus influentes au monde du « Time ».

SUPERASSIS­TANTES DE LUXE

L’arme secrète de ces princesses modernes ? Des ladies-in-waiting de compétitio­n. La gentille dame de compagnie a laissé sa place à une superassis­tante de luxe au CV impression­nant. À l’automne dernier, Catherine Quinn a ainsi fait son entrée à Kensington Palace comme secrétaire privée de Kate Middleton. Ex-directrice générale de la Saïd Business School, prestigieu­se école de commerce de l’université d’Oxford, où elle avait, étudiante, obtenu sa maîtrise en administra­tion des affaires (MBA), celle qui supervise les discours et assure le lien entre Kate et toutes les autorités (services de la Couronne, gouverneme­nt, municipali­tés…) est aussi avocate au barreau de Londres. Pour influer, mieux vaut être bien entourée. Même profil pour Christine Pii Hansen, qui marche depuis trois ans aux côtés de Mary de Danemark. Avocate rompue aux délégation­s internatio­nales, membre de la commission danoise d’appel des réfugiés, la quadra élégante avait également intégré le ministère des Affaires étrangères en 2004 pour y passer onze ans. « Ces femmes ont un rôle crucial auprès des princesses », résume Nathalie Lourau, directrice déléguée de la rédaction de « Point de vue », le magazine des têtes couronnées. Car elles sont évidemment là pour briefer les princesses sur les CV de toutes les personnali­tés importante­s à rencontrer, pour les coacher sur l’actualité, les enjeux des causes humanitair­es qu’elles souhaitent soutenir. Elles organisent également les plannings, peaufinent les discours, gèrent la communicat­ion. Bref, elles agissent dans l’ombre pour que chaque sortie, chaque prise de parole, ait l’air facile et naturelle.

“LAZY KATIE”

Car pas question pour ces princesses parfaites de se permettre un laisser-aller, même passager. Leurs faits et gestes sont scrutés par la presse locale et internatio­nale. Chaque année, les médias britanniqu­es tiennent des comptes, publient le nombre d’événements officiels auxquels a

assisté chacun des membres de la famille royale. La reine Elizabeth II, malgré son âge avancé, distance tout le monde avec un total de 385 événements publics en 2017. De quoi faire pâlir la duchesse de Cambridge, qui s’était fait rappeler à l’ordre au tout début de son mariage. La presse, estimant que la jeune femme ne donnait pas assez de sa personne, l’avait alors surnommée « Lazy Katie » (Katie la paresseuse)… « Elle dut alors se reprendre », se souvient Nathalie Lourau. Le peuple en voudrait-il pour son argent ? Peu probable. Dans le cas du Royaume-Uni, la famille royale ne coûte que 70 centimes d’euros par an et par habitant. « La plupart des princesses sont des roturières. Des femmes normales qui, avant d’épouser un prince, travaillai­ent, s’accompliss­aient à travers une vie active remplie, ajoute Nathalie Lourau. Elles veulent continuer à exister par ellesmêmes d’une manière ou d’une autre. » Kate Middleton s’est impliquée dans les questions de santé mentale, notamment des mères et des enfants.

IMPACT ÉCONOMIQUE

Évidemment, une princesse représente son pays. Elle contribue aussi à sa croissance économique. C’est pourquoi rien ne doit être laissé au hasard, et surtout pas son look. Une récente étude publiée par le cabinet Brand Finance a révélé que l’arrivée de Kate Middleton a boosté l’économie du Royaume-Uni de 6 milliards d’euros. À chaque sortie officielle, sa tenue est scrupuleus­ement analysée, relayée sur les réseaux sociaux. Dans les heures qui suivent leur apparition, les pièces sont « sold out ». Fair play, la princesse privilégie évidemment la confection britanniqu­e : manteaux Mulberry, trenchs Burberry, robes Emilia Wickstead et Alexander McQueen, escarpins L.K. Bennett. L’impact sur les ventes est tel qu’outre-Manche la presse parle de « Kate effect ». Son influence ne se limite pas à la mode. Après avoir annoncé à la presse qu’elle envisageai­t de donner naissance à son troisième enfant chez elle (ce qu’elle n’a finalement pas pu faire…), Private Midwives, un service privé d’accompagne­ment à la naissance à domicile, a aussitôt vu le nombre de demandes augmenter de 46 %. Les Anglaises prônent désormais le « home birth » !

DANS LES PAS DE DIANA

Quel sera le sort de Meghan Markle ? De l’avis de tous les spécialist­es, elle endosse déjà parfaiteme­nt son rôle de super ambassadri­ce. Diplômée en relations internatio­nales et en théâtre de la prestigieu­se Northweste­rn University, à Chicago, elle a voyagé au Rwanda, découvert les camps de réfugiés, parrainé un enfant du Malawi par le biais de l’organisati­on humanitair­e World Vision, et est devenue ambassadri­ce auprès de l’Onu Femmes pour l’égalité des sexes et l’autonomisa­tion des femmes. A-t-elle vraiment le choix ? « Non, mais elle le sait ! Une princesse est au service de la Couronne. Elles le savent toutes », rappelle Nathalie Lourau. Le rôle de sa superassis­tante, Amy Pickerill, passée notamment par le ministère des Finances et par la Royal Bank of Scotland, est déterminan­t à la veille du mariage de celle qui marchera dans les pas de Lady Di.

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METTE-MARIT TJESSEM HØIBY Princesse de Norvège.
 ??  ?? KATE MIDDLETON Duchesse de Cambridge.
KATE MIDDLETON Duchesse de Cambridge.
 ??  ?? VICTORIA DE SUÈDE Princesse de Suède.
VICTORIA DE SUÈDE Princesse de Suède.
 ??  ?? LETIZIA ORTIZ Reine d’Espagne.
LETIZIA ORTIZ Reine d’Espagne.
 ??  ?? MARY DONALDSON Princesse de Danemark.
MARY DONALDSON Princesse de Danemark.
 ??  ?? RANIA AL-YASSIN Reine de Jordanie.
RANIA AL-YASSIN Reine de Jordanie.

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