Madame Figaro

Esthétique : la piqûre de trop.

La médecine esthétique, promesse d’un idéal ? Jusqu’au jour où l’on va trop loin... Quelques conseils de pros pour que le mieux ne devienne pas l’ennemi du bien.

- PAR MARION LOUIS

UNE INJECTION DE BOTOX et bye-bye la ride du lion qui donne l’air si sévère. Un peu d’acide hyaluroniq­ue et le sillon nasogénien s’évanouit. Un peeling et le teint s’éclaire… Du coup, on se sent galvanisée, toute-puissante. Si on peut se l’offrir financière­ment, pourquoi s’en priver ? Pourquoi s’arrêter ? Puis, peu à peu, on se découvre de nouveaux complexes. Trop lisse d’un côté, plus assez de l’autre. On n’a plus de rides, mais, du coup, on ne voit plus que les

cernes ou l’ovale qui fait relâche. Les plus sages se surprennen­t à en vouloir toujours davantage. Pourtant, à les entendre, les femmes ont la hantise des bouches et des pommettes airbag, des fronts tambour ou des teints poupée de cire qui font la risée des dîners en ville et des réseaux sociaux.

SAVOIR DIRE NON

« C’est l’angoisse de beaucoup de mes patientes, confirme la dermatolog­ue Nadine Pomarède. J’entends souvent : “Docteur, surtout, ditesmoi si vous pensez que ça va trop loin.” » Contrairem­ent aux États-Unis, en France, on ne veut surtout pas que nos petits arrangemen­ts avec le temps se remarquent – tout en se voyant un peu quand même. D’ailleurs une femme sur deux n’en parle pas à son compagnon. Finalement, les excès ne sont pas si nombreux. « Les réussites, on ne les voit pas, souligne le Dr Nadine Pomarède. Mais parfois la femme est sa pire ennemie. Certaines sont très insistante­s. » Tous les dermatos et les médecins esthétique­s se réclament de la French touch si discrète, si harmonieus­e, mais tous n’ont pas la même conception du naturel et certains, moins scrupuleux, n’hésitent pas à pousser à la consommati­on.

Pour le Dr Laurence Wallon, dermatolog­ue en Belgique, « c’est au médecin de dire stop. Il faut avant tout préserver la mobilité et l’expression du visage, veiller à l’uniformité avec le cou, les mains, les dents… ». Le bon timing selon elle : des injections d’acide hyaluroniq­ue une fois par an (puis on espace) et de Botox tous les six mois la première année (puis on espace). Le Dr Nelly Gauthier accorde, elle aussi, une grande importance aux proportion­s anatomique­s du visage et se refuse à nourrir les fantasmes d’une image sublimée. « La nature ne connaît pas le zéro défaut, elle n’est qu’erreurs et merveilles. La médecine esthétique ne doit pas être une porte d’entrée pour être aimée. À nous de gérer les narcissism­es un peu fragiles. »

L’ANTI-ÂGE DE RAISON

La journalist­e Linh-Dan Pham, qui a créé un site indépendan­t dédié à l’esthétique au sens large, Le journal de mon corps *, connaît bien les problèmes de surinjecti­on. « On a mis dans la tête des femmes que la chirurgie était dangereuse et que la médecine esthétique était

soft. Du coup, elles en attendent trop. À un moment donné, il vaut mieux un mini lifting du bas du visage qu’un surplus d’acide hyaluroniq­ue, qui alourdit les traits ou forme un bourrelet à la commissure des lèvres. »

Ses conseils pour éviter les pièges :

– Consulter au moins deux médecins, dont un chirurgien esthétique après 45-50 ans. Il aura une vision plus globale et pourra combiner seringue et bistouri. Ne pas hésiter à poser plein de questions. Après, vous déciderez.

– Se regarder aussi de profil et de trois quarts. Des lèvres trop réourlées, ça peut passer de face, mais sous un autre angle, ça ne pardonne pas. – Ne pas se focaliser sur les détails. Un visage est un tout qui doit rester harmonieux.

– Toujours en faire moins que trop, quitte à intervenir plus souvent.

* lejournald­emoncorps.fr

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