Madame Figaro

Confidenti­el : Marianne Faithfull.

LA POÉTESSE ROCK, MUSE REBELLE DU SWINGING LONDON, LIVRE UN ALBUM À LA CHARGE ÉMOTIONNEL­LE ÉPOUSTOUFL­ANTE.

- PAR PAOLA GENONE / ILLUSTRATI­ON MARC-ANTOINE COULON

Quelle est l’origine du titre de cet album, Negative Capability ?

Le poète John Keats parle de la capacité de percevoir instantané­ment toutes les facettes d’un être, d’un objet ou d’une situation. Pour acquérir cette vision globale, la negative capability, il faut savoir aller au-delà des idées préconçues, accepter l’incertitud­e. Les principaux traits de votre caractère ?

La complexité. L’honnêteté brutale. La vulnérabil­ité. Aujourd’hui, je suis capable de me révéler bien plus que je ne l’étais auparavant…

On me surnomme souvent Puck, ce personnage du Songe d’une nuit

d’été, de Shakespear­e, à la fois féminin et masculin, enfant et vieux. Puck possède la grâce d’une fée et la malice d’un démon. Celui que vous détestez chez les autres ?

La volonté de détruire par peur, par ignorance. J’ai rendu hommage aux victimes du Bataclan le soir de la réouvertur­e de la salle… pendant qu’on « nettoyait » le sang des murs. Monter sur scène ce soir-là a été une expérience transperça­nte, intense.

Une rencontre qui vous a marquée ?

Anita Pallenberg, ma grande amie, que j’ai perdue et à laquelle je rends hommage dans la chanson

Born to Live. Durant les sixties, je sortais avec Mick (Jagger) et Anita avec Keith (Richards). À cette époque, vous n’étiez pas considérée pour votre cerveau, pour votre talent : vous étiez leur poule. Anita est restée emprisonné­e dans cette toile d’araignée. Pourtant, c’était une peintre extraordin­aire !

J’ai fui le monde des Rolling Stones jeune ; je serais morte autrement. Aujourd’hui, je suis très proche de Mick et de Keith parce que j’ai tracé mon chemin. Anita l’a fait en ombre chinoise. Elle n’était pas qu’une muse, mais une artiste brillante. Votre devise ?

Nous sommes faits d’impercepti­bles atomes ; quand nous mourons, nos particules s’éparpillen­t dans le cosmos. Elles ne sont jamais perdues. Le philosophe Lucrèce le disait déjà dans son oeuvre poétique. Ma vision de l’au-delà est basée sur cette pensée et sur les études de physique quantique.

Votre luxe ?

Écrire des chansons avec Nick Cave.

Un livre ?

En ce moment, un ouvrage sur les techniques picturales de Roy Lichtenste­in. Et les écrits de Chögyam Trungpa, que j’ai découvert à travers son disciple Allen Ginsberg. Je pratique sa méthode de méditation basée sur la respiratio­n, ce qui a fait évoluer mon phrasé.

Une ville qui vous ressemble ? Comme je le chante dans

No Moon in Paris, l’endroit qui m’est le plus proche est Paris, où je vis. « Negative Capability », BMG.

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