Enquête : à quelle heure finissent les femmes qui réussissent ?
CRÉATRICE DE START-UP, AVOCATE, ANIMATRICE TÉLÉ..., ELLES SONT PASSIONNÉES PAR LEUR MÉTIER MAIS NE VEULENT PLUS CHOISIR ENTRE CARRIÈRE ET VIE PRIVÉE. CINQ FONCEUSES EN QUÊTE DE SENS ONT ACCEPTÉ DE RÉPONDRE À CETTE QUESTION : COMMENT ORGANISEZ-VOUS VOTRE FIN DE JOURNÉE ?
CC’EST LA QUESTION QUI ENTRAÎNE TOUTES LES AUTRES. Selon un récent sondage sur le leadership*, produit par Madame Figaro avec BVA , il apparaît que les femmes entre 30 et 40 ans (ainsi que les hommes, d’ailleurs) ne veulent plus occuper de postes dirigeants en grande partie à cause des horaires qu’ils impliquent. Et qu’elles revendiquent le droit à la déconnexion. D’où une nouvelle relation au travail, complexe, faite d’ambition, du besoin de se sentir investie et passionnée, mais aussi de rejet et de la nécessité de poser des limites quand la frontière entre vie pro et vie perso devient de plus en plus poreuse.
LE CONSTAT EST LÀ : la journée de travail s’arrête à 17 heures à New York, en Grande-Bretagne ou au Danemark. En France, elle se prolonge jusqu’à 19 h 30, 20 heures, voire plus tard encore. Quand elle ne reprend pas à la maison, après le dîner. Déroger à cette règle n’est jamais simple ; l’accepter vire au casse-tête organisationnel quand on a des enfants, et pose la sempiternelle question du partage des tâches dans le couple.
« Depuis deux ans, explique Éléna Fourès, consultante en leadership, fondatrice du cabinet Idem per Idem, on observe que les postes à responsabilité ne trouvent plus preneuses en interne. Ce n’est pas l’expertise qui manque, c’est l’envie. » Le modèle basé sur la réussite à tout prix serait-il dépassé ? « Il y a quelques années, par la promesse d’une carrière, on rendait les gens fidèles. C’était presque un honneur d’être en CDI dans une grande entreprise, explique une gestionnaire de carrières à haut potentiel. Aujourd’hui, on assiste à de nombreuses démissions, la plupart du temps liées au manque de flexibilité dans le travail. »
Cristallisation de l’équilibre entre la vie privée et la vie professionnelle, les horaires sont au coeur du problème. À quelle heure quitter le bureau sans que cela nuise à ma progression ? Comment ne pas me sentir coupable de partir tard… ou tôt ? « À l’ère du télétravail, du smartphone, le modèle français n’est plus désirable, poursuit Éléna Fourès. Aux États-Unis ou au Danemark, si vous n’êtes pas partis à 17 heures, c’est que vous travaillez mal ou que vous êtes désorganisés. »
Une cadre d’un grand groupe français ajoute : « Les nouvelles générations ne veulent plus sacrifier leur vie privée, elles sont très cash à ce sujet. Et elles ont raison : autour de moi, je connais des gens qui n’ont pas vu leurs enfants grandir, d’autres qui n’ont rien construit. Il faut être prudent : vous pensez être arrivé à ce que vous souhaitiez professionnellement et, soudain, vous vous retournez pour vous dire : “Tout ça pour ça ?” Ce jour arrive plus vite qu’on ne le croit. » Élevées dès le plus jeune âge dans la course à l’excellence, les femmes trentenaires et quadra comptent bien réussir partout, au travail… et à la maison. « On ne peut pas tout avoir », dit le dicton populaire. « Pas en même temps », rectifient-elles. Faire carrière, élever ses enfants, prendre du temps pour soi et pour son couple : ces femmes ont décidé de ne pas choisir. D’ailleurs – et c’est peut-être la nouveauté –, elles s’autorisent même davantage de liberté, au fur et à mesure qu’elles progressent en leadership. À méditer…