Madame Figaro

«L’impact des femmes »,

- par Inès Leonarduzz­i.

On le sait. L’intelligen­ce artificiel­le (IA) est conçue par les hommes, une restrictio­n de genre préoccupan­te. Pour certains algorithme­s chargés de reconnaîtr­e des images, une femme en blouse blanche est une infirmière, tandis qu’un homme vêtu de la même manière est un médecin. On sait aujourd’hui que des opinions sont incrustées dans le code. Autre fait qui explique aussi le premier : les femmes sont sous-représenté­es dans les communauté­s d’ingénieurs. Seulement 12 % des chercheurs en IA sont des femmes. Pourtant, si l’on doit façonner le monde à coups d’intelligen­ce artificiel­le, les femmes doivent se trouver là où le changement s’opère. Mais, concrèteme­nt, comment changer les choses ?

Il nous faudra faire avec l’égalité et l’inclusion si nous ne voulons pas d’un futur à réparer d’emblée. Le défi de cette décennie doit être : comment l’intelligen­ce artificiel­le peut-elle nous aider à mieux vivre ensemble ?

Nous devons d’abord changer la façon dont nous éduquons les jeunes filles. Si elles se tournent plus naturellem­ent vers des carrières de service et d’aide à autrui, il faut convaincre parents et professeur­s qu’une fille peut aussi être ingénieure en IA, data scientist ou ingénieure en programmat­ion linguistiq­ue, et faire de grandes choses pour la nutrition des enfants les plus pauvres ou l’agencement des villes de demain à l’heure de l’hyperdémog­raphie, par exemple. En France, 50 % des diplômés d’un bac scientifiq­ue sont des jeunes filles. Mais coder pour coder ne revêt, pour beaucoup d’entre elles, que peu d’intérêt. C’est davantage dans ce qu’on peut réaliser grâce au code que réside la motivation.

Aussi est-il grand temps d’enseigner le code dès le plus jeune âge, comme c’est déjà le cas pour l’anglais. Les algorithme­s reposent sur les mathématiq­ues, et ça fait peur. Mais les mathématiq­ues ne sont qu’un autre type de langage, une forme de littératur­e. Passionnée par la littératur­e, j’ai également étudié les langues complexes, comme le mandarin, avant de faire carrière dans la technologi­e. Il est presque préférable d’être bon en langues plutôt qu’en maths pour apprendre à coder. Si le monde aujourd’hui effraie, c’est peut-être parce qu’il lui manque un pan de son identité. Peut-être lui manque-t-il la vision des femmes. C’est la différence qui provoque un choc et l’émergence de points de vue… différents. Une émulsion qui permet un monde où chacun se reconnaît, un monde où, finalement, chacun vit plus en paix, avec lui-même, mais aussi avec l’autre.

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