Madame Figaro

Thérapie de couple : les mots qui libèrent.

- PAR DELPHINE BAUER

QU’EST-CE QUI SE TRAME DANS LE HUIS CLOS DU CABINET DE CAROLINE KRUSE ? ON SE MET À NU, ON PLEURE, ON RIT, ON SE RETROUVE, ON SE SÉPARE... DES SCÈNES QUI INSPIRENT À CETTE THÉRAPEUTE UN LIVRE, IL FAUT QU’ON PARLE, ET, DANS NOS PAGES, QUELQUES CLÉS POUR SURVIVRE EN MILIEU CONJUGAL.

N“NOTRE COUPLE N’EST PAS CELUI DES MAGAZINES”

« Le couple, c’est une éternelle valeur refuge. Et, aujourd’hui, dans un monde qui menace de flamber, où, malgré son tri sélectif, on ne peut pas grand-chose contre la fonte de la banquise, où le travail est incertain, on met beaucoup de poids sur cette relation. Les gens pensent souvent que, dans cette sphère au moins, ils ont un peu plus de chances de pouvoir changer les choses. Alors il faut réussir ! Or, il n’existe pas de couple parfait. Le conseil conjugal permet souvent d’apprendre à aimer les imperfecti­ons, celles de l’autre, comme celles de son couple. La quête de la perfection ? C’est se cantonner à l’échec. Il faudrait être une épouse et une mère exceptionn­elles, une amante parfaite, idem pour les hommes… Il y a trop d’injonction­s. Les préceptes de développem­ent personnel peuvent parfois peser. Je suis là pour reformuler ce qui a pu être entendu avec des oreilles fatiguées, lasses, ou mal interprété par manque de confiance en soi. »

“RANGE TES CHAUSSETTE­S !”

« À partir du moment où l’on habite ensemble, les conflits d’intendance débarquent. Ils ne sont pas anodins. Derrière se dessinent les questions de rapports de pouvoir, des problémati­ques individuel­les. Les gens qui aiment le rangement, parfois jusqu’à la manie, sont souvent des personnali­tés angoissées, qui ont besoin de contrôler la situation, sinon elles paniquent. Parfois, quand on réussit à analyser d’où vient ce besoin de contrôle, cela permet de comprendre ce qui se joue à deux. “Ce n’est pas moi qui le rends comme ça, il a une difficulté individuel­le”, peut se dire celui qui subit cette volonté de contrôle. Chacun comprenant mieux comment fonctionne l’autre, on peut alors faire un pas ensemble. C’est-à-dire être un peu plus respectueu­x. Ce n’est pas un drame de devoir ranger ses affaires de temps en temps, ni de voir une assiette traîner dans l’évier une heure ou deux ! »

“ON NE PEUT RIEN TE DIRE !”

« L’idée, quand un couple arrive en consultati­on, c’est d’essayer de comprendre ce qui, dans les histoires personnell­es, vient impacter la relation. Un exemple : deux femmes viennent me voir car elles se disputent tout le temps. Au début, elles me disent que c’est sur tout et sur rien. Au fur et à mesure des séances, je comprends que le conflit naît du fait que l’une s’adresse à l’autre de manière agressive. L’autre ne se sent pas entendue, pas respectée, mais dévalorisé­e. Les raisons pour lesquelles on s’est aimé peuvent faire à un moment donné que le couple dysfonctio­nne. C’est le moment de s’interroger – comment s’est constitué le choix, comment on a réintrodui­t d’éventuels conflits ou manques dans la relation qui venaient d’ailleurs –, d’essayer de dégager le couple de ce qui ne lui appartient pas. »

“TU M’AS TROMPÉ(E)… TU NE M’AIMES PLUS ?”

« Dans les questions d’infidélité, rien n’est jamais tout noir ou tout blanc. Une relation se joue à deux : on s’est aimés à deux, on est en conflit à deux. Tromper l’autre peut être pris comme un signal d’alarme qui signifie : “Attention, quelque chose ne fonctionne plus dans notre couple, mais je n’ai pas trouvé d’autre moyen de l’exprimer que d’aller voir ailleurs.” Cela peut être extrêmemen­t coûteux, mais également rebattre les cartes et faire réellement évoluer les choses… si l’autre accepte de se remettre un peu en question et sort de sa position de victime. Parfois, quand l’homme, ou la femme, est une personnali­té très séductrice, je sens que le couple restera ensemble sans que rien ne change. Dans ce cas, souvent chez des personnes un peu âgées, la seule solution est de trouver une forme d’accord, afin de développer tout ce qu’il y a de bien entre eux, et, pour le trompé, d’y accorder moins d’importance. C’est de la négociatio­n qui ne dit pas son nom. En général, la

question du désir est difficile à aborder de front. Souvent, on comprend que la baisse du désir est associée à tout à fait autre chose. Et le désir revient quand le problème est analysé, abordé, élaboré. »

“JE VEUX QU’ON RESTE ENSEMBLE, MAIS…”

« Selon les génération­s, les enjeux ne sont pas les mêmes. Les plus de 50 ans espèrent poursuivre leur vie à deux en étant un peu plus heureux ensemble, en se disputant moins. Que ça soit plus cool, plus harmonieux. À la retraite, ils souhaitent créer une entente cordiale et une bonne dialectiqu­e entre le couple et l’extérieur, trouver ensemble ce qui les nourrit, comme s’occuper des petitsenfa­nts. Pour les plus jeunes, c’est souvent préventif. Ils ne veulent pas attendre que les choses s’enveniment et, puisqu’ils tiennent l’un à l’autre, ils veulent éviter le couple Kleenex, balayé d’un revers de manche, qui se sépare au moindre accroc. Très souvent, le fait d’avoir fait cette démarche renforce leur relation : que l’autre vienne consulter est perçu comme un signe d’amour. Point commun intergénér­ationnel : le besoin de créativité. À tout âge, les couples aspirent à un peu de brillance. À davantage de joie, d’inventivit­é. Ce qui ne signifie pas qu’il faut que tout soit extraordin­aire pour que ça marche ! Par périodes il ne faut pas gommer la “bonne” routine, qui peut être rassurante. »

« Il faut qu’on parle, 60 sujets à aborder en couple avant qu’il ne soit trop tard », de Caroline Kruse, illustrati­ons de Benoît Bastard, Éditions du Rocher. À paraître le 6 novembre.

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