Madame Figaro

TOUT SUR LE TATTOO

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DISCRET OU EXUBÉRANT, MONOCHROME OU ÉCLATANT DE COULEURS, LE TATOUAGE EST “ENCRÉ” DANS L’ÉPOQUE. COMMENT LE CHOISIR, L’ENTRETENIR ? PEUT-ON L’EFFACER ? CE QU’IL FAUT SAVOIR AVANT DE SE PIQUER AU JEU…

IL SEMBLE BIEN LOIN LE TEMPS OÙ LES TATOUAGES étaient réservés aux mauvais garçons, aux marins, aux bikers et aux cercles

undergroun­d. En septembre, à Paris, Le Bon Marché – temple du luxe et du bon goût – lui a même rendu hommage grâce au collectif de L’Encrerie lors de l’exposition So Punk Rive Gauche. Les filles des beaux quartiers parisiens pouvaient alors s’encanaille­r en se faisant graver sur la peau des silhouette­s de pin-up hollywoodi­ennes, des chardons stylisés façon Gustave Doré ou des messages rock en lettres gothiques.

SIGNES EXTÉRIEURS DE TENDRESSE ?

Délestées de leur caractère marginal, ces peintures corporelle­s sont devenues, depuis le début des années 2000, un véritable phénomène de société, le nombre de tatoués et de tatoueurs ne cessant d’augmenter. Ainsi, 14 % des Français avaient succombé en 2017, avec une proportion encore plus forte chez les femmes (17 %) et chez les jeunes (27 % des moins de 35 ans) (1). Tandis que le Mondial du Tatouage – qui fêtera ses 10 ans en mars prochain - accueille plus de 30 000 curieux chaque année à la Grande halle de la Villette, à Paris, laissant deviner une pratique de plus en plus banalisée. Si la publicité et la mode se sont vite emparées de ces codes, les stars de cinéma ou de la musique ont, elles aussi, largement contribué à démocratis­er ces ornements à la fois rebelles et sexy. Qu’ils soient minuscules comme les ancres, les croix et autres coeurs discrets sur Kate Moss, ou ostentatoi­res comme les prières bouddhiste­s, proverbes en latin, tigre asiatique et autres coordonnée­s géographiq­ues imprimées sur la peau d’Angelina Jolie. Même Catherine Deneuve, icône absolue, arbore un dessin tribal et acéré le long de sa nuque. L’anthropolo­gue David Le Breton voit dans ce phénomène une quête de singularis­ation, une façon d’affirmer son identité et d’afficher sa différence. « Le tatouage est devenu un accessoire de beauté, un renouvelle­ment du bijou, une parure contribuan­t à la mise en scène de soi. Dans un monde d’images, il faut se faire image. » (2) Une décoration, mais aussi, souligne notre expert, « une forme de protection de seconde peau face à l’incertitud­e du monde ».

(1) Sondage Ifop réalisé en 2017, en partenaria­t avec le Syndicat national des artistes tatoueurs (Snat). (2) Extrait de « 100 000 ans de beauté », ouvrage collectif, Éditions Gallimard.

SANS PEUR ET SANS REGRET

« Mieux vaut aller à l’inverse des tendances, conseille Tin-Tin, le tatoueur des stars et président du Syndicat national des artistes tatoueurs. Car il n’y a rien de plus antinomiqu­e que la mode – éphémère par essence – et le tatouage, qui est permanent. On évite donc les dessins de hipsters, les mantras du moment ou les symboles trop faciles, qui risquent de devenir désuets, même ringards, avec le temps. » Voir le fameux dauphin façon Le Grand Bleu ou le barbelé de Pamela Anderson, tous les deux trop datés. Plus sûrs : les dessins séculaires comme les dragons, les roses, les serpents et autre croix. Certes classiques, ils passeront mieux les années et éviteront les mésaventur­es.

LA FOLIE DES FINGER TATTOOS

Que ce soit les underboobs (entre les seins) ou les finger

tattoos (sur les phalanges) rapides à réaliser et pas chers, ils sont devenus l’accessoire fashion préféré des millennial­s. Kendall Jenner, Bella Hadid, Kaia Gerber…, elles sont toutes passées dans le studio du New-Yorkais JonBoy, qui réalise des tatouages épurés et graphiques.

« Attention, toutefois : ces dessins minimalist­es ne tiennent pas longtemps. Notamment sur les doigts, une zone où la peau est en contact permanent avec l’air et l’eau et se régénère donc plus vite, prévient le tatoueur Mikael de Poissy. L’encre s’y efface rapidement, les pigments fusent sous la peau et le motif finit par se déformer. »

L’HYGIÈNE AVANT TOUT

Pour éviter toute infection, l’hygiène du salon doit bien évidemment être irréprocha­ble : aiguilles stérilisée­s et à usage unique, matériel plastifié, encres conformes aux réglementa­tions française et européenne, port de gants et nettoyage antiseptiq­ue. Pour rappel, le principe du tatouage consiste à introduire des pigments dans la peau : une fois déposée, l’encre apparaîtra par transparen­ce sous l’épiderme après cicatrisat­ion. « Un bon tatoueur doit aussi savoir prendre en compte la spécificit­é de chaque peau : couleur, texture, état… », explique Tin-Tin. Pour choisir son tatoueur, il est impératif de se renseigner via les magazines spécialisé­s – Tattoo Life ou Tatouage Magazine –, mais aussi sur Instagram et sur Internet, où il est désormais très facile de comparer les styles et les pratiques de chacun. »

PRENDRE SOIN DE SON DESSIN

Après une séance de tatouage, on désinfecte deux ou trois fois par jour, à l’eau tiède et avec une solution antiseptiq­ue, avant d’appliquer un soin cicatrisan­t (Cicafalte d’Avène, Cicaplast de La Roche-Posay, Cicabio de Bioderma...). Pendant toute la durée de la cicatrisat­ion (compter environ trois semaines), on prévoit aussi des vêtements amples pour empêcher les frottement­s, et on évite la piscine, par crainte des infections. Puis, lors des trois mois suivants, on ne l’expose jamais au soleil sous peine de taches brunes irréversib­les. Plus tard, on le protège toujours à l’aide d’une protection solaire SPF 50 : « Le tatouage est photosensi­ble, et ses couleurs risquent de s’affadir sous les UV », précise Tin-Tin.

SOS DÉTATOUAGE

« Retirer les pigments prend du temps, peut faire mal et, surtout, coûter très cher, insiste Mikael de Poissy. D’où la nécessité de mûrement réfléchir son tatouage avant de franchir le pas. » S’il est très étendu, coloré ou de mauvaise qualité, le dessin résistera et pourra nécessiter jusqu’à vingt séances de laser pigmentair­e, chacune espacée de deux mois (de 50 € à 150 € le rendez-vous). Reste la solution zéro risque avec les tatouages éphémères. Il en existe de toutes les formes et de toutes les couleurs. Les décalcoman­ies, les bijoux de peau ou les tampons encreurs perdurent une journée : ils habillent un décolleté, une épaule, une cheville ou l’arrière de l’oreille les soirs de fête. La solution pochoir est plus durable. On l’applique sur la peau, on vaporise une encre testée dermatolog­iquement, et le dessin est imprimé pour une quinzaine de jours (des centaines de modèles chez inkaparis.com). Les artistes peuvent aussi dessiner le motif de leur choix avec du make-up à effet tatouage, tel l’eyeliner liquide Tattoo Liner de Maybelline New York, qui promet une tenue de trente-six heures. Le make-up artist Yann Rebelo l’utilise volontiers pour tracer des petits motifs, au coin de l’oeil ou ailleurs. Enfin, chez Diptyque, on propose de très élégants patchs parfumés : Fleur pour Eau de Rose et Do Son, cygne pour l’Ombre dans l’Eau.

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