Madame Figaro

Défilés : Chanel, l’esprit des lieux.

Pour sa première collection Métiers d’art sans Karl Lagerfeld, Virginie Viard a reconstitu­é l’appartemen­t de Coco Chanel sous la nef du Grand Palais. Un hommage virtuose aux codes de la couturière.

- PAR MARION DUPUIS

C’est l’histoire d’un appartemen­t secret de la rive droite parisienne. Celui de Gabrielle Chanel, un antre privé, totalement habité par l’esprit de Mademoisel­le. Pour y accéder, il faut se rendre à la boutique du 31, rue Cambon et monter deux escaliers. Derrière une porte, se cachent quatre pièces décorées par la créatrice légendaire. Depuis sa disparitio­n, il y a quarante-huit ans, rien n’a bougé. Mais tout (ou presque) a été téléporté au Grand Palais. Ou tout du moins reconstitu­é pour les besoins du défilé Métiers d’art 2019-2020 de la maison, baptisé Paris - 31 rue Cambon.

L’IDÉE VIENT DE VIRGINIE VIARD. La directrice artistique des collection­s mode cherchait non pas à nous emmener dans des contrées éloignées, mais à se recentrer sur l’essentiel de Chanel. « Là, c’est le retour aux codes et au premier défilé des Métiers d’art en 2002, qui a eu lieu dans les salons du 31, rue Cambon, justement, rappelle-t-elle dans la note d’attention. Il m’est très cher, les mannequins y fumaient des

cigarettes en écoutant Lou Reed. Il s’agissait d’une attitude plus que d’un thème. » Alors tout y est : le grand canapé beige, où Coco Chanel aimait se lover, ses bibliothèq­ues de livres, ses bouquets de blés dorés, ses fameux paravents de Coromandel… Dès l’entrée du Grand Palais, les invités pouvaient admirer cette suite de salons identiques. Et puis, au fond du podium, sous de monumentau­x lustres de cristal, une surprise de taille : l’escalier mythique, aux miroirs à facettes cubistes, où aimait se percher Mademoisel­le pour regarder ses défilés sans être vue.

UN VRAI DÉCOR DE CINÉMA, signé en collaborat­ion avec la réalisatri­ce Sofia Coppola, amie de longue date de la maison Chanel (elle y a été stagiaire de Karl Lagerfeld à l’âge de 15 ans). La scénograph­ie convoque un mirage d’images fantasmées du passé. Mais, lorsque les mannequins descendent l’escalier, rien de suranné ne transparaî­t.

IL Y A D’ABORD CES PETITS MANTEAUX NOIRS, très chics, au porter décontract­é, ceinturés de rubans de mousseline, brodés de blé doré et de chaînes en paillettes et en perles. Il y a aussi cette relecture très actuelle des tailleurs – chère à Chanel –, dont les vestes courtes, à bout arrondi, se juxtaposen­t aux jupes taille basse, fendues sur le devant ou dévoilant, sur peau nue, un ruban de chaîne et de perles. Les combinaiso­ns pantalons en tweed se portent, elles, les mains dans les poches, dans un esprit d’élégance effortless. Très remarqué aussi, le sweat-shirt ivoire, rebrodé d’un « 31 rue Cambon » tout en paillettes noires, ou ce tee-shirt blanc tout simple, rentré dans une jupe au logo graphique parsemé de camélias.

QUANT AUX CODES DE COCO CHANEL, le noir, le blanc, les camélias, le tweed, les souliers bicolores, les noeuds, les myriades de sautoirs, ils sont omniprésen­ts, magnifiés par les maisons des Métiers d’art dans un esprit contempora­in. Ainsi, ces bombers du soir, recouverts en

all over de 365 camélias en soie blanche strassée de Lemarié, portés avec un pantalon pailleté ; cette robe bustier, brodée par Lesage de blé, de perles et de ruban ; ou encore ces très désirables escarpins bicolores, ornés de petits noeuds en cuir doré, à bouts noirs, réalisés par Massaro.

Le principe de ces collection­s Métiers d’art, qui célèbrent la virtuosité des artisans brodeurs, plumassier­s, paruriers, plisseurs, bottiers, chapeliers… est également palpable dans les longiligne­s robes de dentelle noire, au décolleté encadré de plumes ; dans ces jupes étincelant­es, entièremen­t rebrodées de paillettes argentées ; ou dans ces tweeds au tie and dye arcen-ciel. L’allure est chic, très Chanel, très Lagerfeld aussi. Assortie d’une féminité créative et sensuelle que l’on peut attribuer, elle, à Virginie Viard. Comme une vision du 31, rue Cambon updatée pour les nouvelles génération­s.

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 ??  ?? 1. Le camélia blanc, sa signature éternelle. 2. La minaudière dorée, constellée de strass, représenta­nt la petite cage à oiseau présente dans l’appartemen­t de Coco Chanel. 3. Les accumulati­ons de perles et de bijoux au poignet et autour du cou, so Gabrielle.
1. Le camélia blanc, sa signature éternelle. 2. La minaudière dorée, constellée de strass, représenta­nt la petite cage à oiseau présente dans l’appartemen­t de Coco Chanel. 3. Les accumulati­ons de perles et de bijoux au poignet et autour du cou, so Gabrielle.
 ??  ?? La collection Paris – 31 rue Cambon des Métiers d’art.
La collection Paris – 31 rue Cambon des Métiers d’art.
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