TÊTES CHERCHEUSES ET CHEFS D’ENTREPRISE
ON LES CONNAÎT PEU, mais ils sont essentiels : la qualité de leur travail fait que l’on croit ou non à une histoire, que l’on se sent ou non transporté. Ce sont les costumiers de cinéma, de séries ou de théâtre. Mieux que des stylistes : de véritables créateurs. Ils vivent dans l’ombre des réalisateurs mais sont les révélateurs de la vision artistique de leur oeuvre et les traducteurs de leurs émotions. « Notre rôle est de les accompagner, de les écouter, de les comprendre et de répondre, avec nos costumes, à leurs désirs », souligne Valérie Adda, costumière passionnée par les étoffes depuis qu’elle a reçu une machine à coudre pour ses 5 ans.
Diplômée de l’école de stylisme Fleuri Delaporte, cette experte a commencé sa carrière en 1985, comme petite assistante sur le film d’Arthur Joffé, À Paris, sa maison, un loft lumineux, est à l’image de son métier : un savant mélange de styles et d’objets parfois incongrus – comme une pompe à essence au milieu du salon –, dont les influences s’entrechoquent pour stimuler la fantaisie, la créativité et l’ouverture d’esprit. Le foutoir n’est qu’apparent. Valérie Adda a rangé sa vie de costumière dans sa tête, ses carnets, ses dossiers et ses placards. Sur les portants, qui occupent une pièce entière, sont disposés des vêtements de toutes époques. De la lingerie des années 1940, des robes 1950, des smokings 1970, des accessoires et des bijoux de tout temps, qui lui servent aujourd’hui à imaginer des silhouettes, à lui donner des idées de couleur, de texture. « À stimuler mes souvenirs », précise-t-elle. Sur les étagères, des centaines de livres d’histoire, de mode et des dossiers qui contiennent les silhouettes de tous ses films, téléfilms et pièces de théâtre pour lesquels elle a travaillé. Les spectaculaires robes corsetées en taffetas et autres tailleurs impeccablement coupés récemment vus dans
la série à succès (près de 8 millions de personnes ont suivi les 8 épisodes diffusés sur TF1 et Netflix cet hiver), c’est elle. Valérie Adda procède toujours de la même façon : dès qu’elle reçoit le scénario d’un film ou d’une série, elle commence à gamberger, se documente en profondeur (bibliothèques, musées, récits, images d’archive…) et prépare un moodboard d’images, d’inspiration, afin de présenter au réalisateur et à la production l’époque dans laquelle les personnages vont évoluer, telle qu’elle l’envisage. « Pour il fallait que je montre comment étaient habillés les aristocrates, les bourgeois, les prostituées, les militaires, les policiers, les gens des petits métiers à la fin du XIXe siècle. » Il ne s’agit pas de copier mais de restituer l’esprit d’une époque au goût d’aujourd’hui. Ensuite, elle réalise ses premières esquisses, accroche des échantillons de tissu sur les croquis et attend : « Pour voir si l’ambiance se met en place et si mes personnages commencent à vivre. »
En tout, pour cette série à grand budget, Valérie Adda a dû imaginer 1 200 costumes et une foule d’accessoires, chapeaux, bijoux et autres sacs. Certains ont été loués, d’autres