DES MAGICIENS À L’ÉCOUTE DES ACTEURS
« Un personnage ne peut vraiment prendre corps que lorsque nous rencontrons l’acteur », souligne JeanDaniel Vuillermoz, autre pointure du métier. Fins observateurs, les créateurs de costumes radiographient en un regard ceux qu’ils croisent. Les essayages sont un moment particulier, intime. Il faut parfois déployer des talents de psychologue pour mettre en confiance, pousser à l’audace, rassurer, accompagner la métamorphose d’artistes qui ne manquent ni d’ego ni de fragilité. À charge aux costumiers de dissimuler parfois les petits complexes, de rééquilibrer l’anatomie à l’écran, d’allonger la silhouette… « Certains se détachent plus facilement de leur apparence, acceptent même volontiers de se vieillir ou de s’enlaidir, d’autres montrent plus de réticences, constate Madeline Fontaine. C’est un travail collaboratif quoi qu’il arrive, qui repose sur la confiance. Lors des essayages, on cherche, on propose, on échange, il faut trouver l’attaque du personnage. À un moment, il y a un déclic. Travailler avec Natalie Portman, par exemple, est aisé. C’est une grande professionnelle, d’une gentillesse inouïe, et son investissement dans un rôle passe par le costume. Elle est non seulement attentive mais aussi réellement présente à chaque étape des essayages. Elle ne se protège pas. Les plus grands acteurs sont les plus faciles. »
Aider l’acteur à entrer dans la peau de son personnage, telle est la mission du costumier. « Quand nous avons créé les costumes de réalisé par Patrice Chéreau, nous avions coincé la tête d’Isabelle Adjani dans une sorte de fraise en métal qui l’empêchait de bouger », se souvient JeanDaniel Vuillermoz. Elle ne pouvait rien faire sinon se tenir très droite. “C’est inconfortable”, disait-elle à Patrice Chéreau. “Tant mieux”, lui répondait-il. Cette droiture lui donnait un maintien, de l’autorité, un port royal. Isabelle Adjani, dont le talent est exceptionnel, a su faire de cette contrainte imposée par l’habit, une force dans son jeu d’actrice. Un costume doit enrichir une interprétation et permettre à l’acteur d’aller à la recherche du personnage qu’il doit incarner, de surprendre aussi », précise celui qui a reçu le Molière du créateur de costumes pour en 2011, et le César des meilleurs costumes pour en 2001. L’imaau