Madame Figaro

LA TENTATION

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forme ou se conformer aux canons esthétique­s en vigueur. Mais c’est moins la beauté en tant que telle qui est recherchée que la conformité aux exigences du milieu et de la mode. Surtout, de nos jours, la chirurgie esthétique est une chose que l’on fait pour soi. Pour autant, le pour soi est un impératif aussi tyrannique que l’était jadis l’étiquette. Aussi intime et personnel soit le besoin de se plaire et de se sentir en accord avec soi-même, il n’en est pas moins puissammen­t suggéré par la société ambiante.

CE BESOIN DE MODIFICATI­ON, de correction, de retouche ne naît pas d’un désir de ressembler à une star. Chez les plus jeunes, qui peuplent les salles d’attente des praticiens et qui sont à la fois troublés par les transforma­tions incontrôlé­es de leur corps et particuliè­rement épris de conformité, le trouble que l’on espère voir disparaîtr­e en ajoutant ou en ôtant une taille de poitrine, en rectifiant un nez, renvoie à un sentiment d’inadéquati­on. À l’autre bout du spectre, la chirurgie du vieillisse­ment se nourrit d’un sentiment de gêne identitair­e qui s’exprime par le fait que l’on ne se reconnaît plus. Entre les deux, dans le vaste domaine dit de l’âge moyen étendu, le désir d’améliorati­on et d’empowermen­t trouve en la chirurgie esthétique un appui d’autant plus normalisé que les actes à répéter sont fractionné­s et de moins en moins invasifs. Avec toutefois cette crainte exprimée de tomber dans « l’abonnement » – besoin d’intervenir sitôt qu’un élément physique déplaît ou gêne –, et ainsi franchir la frontière entre rapport maîtrisé et addiction.

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