ÉDITO/« Sur les chemins du sacré », par Frédéric Lenoir.
« Les Chemins du sacré », de Frédéric Lenoir, Éditions de l’Observatoire, 336 p., 33 €.
L’approche de Noël peut nous donner l’occasion de nous réinterroger sur notre rapport au religieux. Dans nos sociétés sécularisées, pour nombre de nos contemporains, le rapport à Dieu ou à la foi n’a pas complètement disparu. Il est plutôt clignotant : il s’allume ou s’éteint en fonction des événements et des étapes de nos vies. Mais ce qui reste probablement commun à la plupart des êtres humains, quelle que soit leur culture, c’est le sens du sacré. La définition la plus commune du sacré a été formulée par le sociologue Émile Durkheim, qui a montré que les grandes religions faisaient une distinction entre le « sacré » et le « profane », en sacralisant des espaces (hauts lieux, temples, synagogues, églises, mosquées, etc.). Par extension, on dira que le sacré, c’est ce que nous mettons à part, au-dessus de tout : les valeurs sacrées de nos démocraties modernes, par exemple, sont la liberté de conscience et d’expression. Je préfère quant à moi utiliser la définition, plus anthropologique, proposée par Rudolf Otto : le sacré, c’est ce sentiment de crainte et d’émerveillement que ressent l’être humain devant la beauté de la nature et le mystère de la vie. Ce sentiment universel est à l’origine de toutes les quêtes spirituelles du monde, qu’elles soient religieuses ou laïques. Pour la réalisation d’une collection de films documentaires pour Arte, l’opportunité vient de m’être donnée (avant le premier confinement !) de voyager sur les cinq continents, à la rencontre d’hommes et de femmes qui vivent le sacré de manière très intense, à travers des expériences aussi diverses que la marche, la sagesse, la solitude, l’art ou l’immersion dans la nature. J’ai vécu des moments inoubliables, comme au Guatemala, ce rituel chamanique effectué par quatre femmes mayas devant un volcan qui est entré en éruption pendant la cérémonie !
J’ai raconté ce voyage dans un beau livre de photos *, car j’avais à coeur de faire partager ces quêtes si diverses qui font écho à notre propre ressenti, même s’il n’est pas nommé : lequel d’entre nous n’a jamais été bouleversé par la beauté de la nature et ne s’est jamais interrogé sur l’énigme de l’existence et le mystère du monde ?