MEGHAN MARKLE construit son storytelling
POUR VÉRONIQUE REILLE SOULT *, L’INTERVIEW-VÉRITÉ DE LA DUCHESSE DE SUSSEX A UNE INTENTION POLITIQUE.
UN ENTRETIEN SCÉNARISÉ
« Ce show raconte une histoire comme les Américains aiment en entendre : celle d’une héroïne fragile – parfois au bord des larmes – mais courageuse, qui a délivré son mari prisonnier de la « firm ». Ce terme, froid, impersonnel, qui sous-tend presque une secte, permet de déshumaniser la famille royale. Et d’éviter les attaques personnelles qui visent à détruire un système en révélant des secrets parfois obscurs. La reine n’est jamais remise en question, loin de là. Meghan est une vraie pro, interviewée par une autre grande pro, Oprah Winfrey, incontournable aux États-Unis. Elle se crée une notoriété, une stature de femme courageuse, comme le lui a répété plusieurs fois son interlocutrice. Elle construit son image dans une logique américaine. La question du racisme posée en plein phénomène Black Lives Matter a nécessité que la reine publie un communiqué précisant prendre ces accusations « très au sérieux ».
UN ÉPISODE DE THE CROWN ?
« La seule faute de goût de la part des Sussex a finalement été de relater une première cérémonie de mariage en toute intimité – même si, depuis, l’archevêque de Canterbury en a nuancé la portée –, ce qui a impliqué qu’ils auraient joué la comédie lors de leur mariage en grande pompe suivi par le monde entier. Ce show à rebondissements, c’est presque le prochain épisode de The Crown. » UN AVENIR POLITIQUE PROGRAMMÉ ? « Meghan a pris l’avantage. Le jour de la diffusion de l’interview en Grande-Bretagne était celui de la réouverture des écoles, sujet qui a occupé 30 % de l’espace médiatique, tout le reste était consacré à Meghan et Harry. Au final, Meghan a consolidé sa notoriété aux États-Unis, pays dont elle maîtrise les codes. Après ses différentes prises de parole, au cours de l’année écoulée et cette interview calculée, elle a probablement posé les jalons d’un devenir politique… Sinon, pourquoi aurait-elle fait cela ? Quel mouvement choisira-t-elle de supporter ? Ou finira-t-elle par en créer un ? »
* Spécialiste en analyse de l’opinion et présidente de Backbone Consulting.