Magicmaman Hors-série

Faites-vous confiance

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Une naissance a toujours le don de délier les langues, de provoquer une multitude de confidence­s ou de conseils. Grands-parents, copines, voisines… tout le monde s’y met, et tout y passe. Du décryptage des pleurs aux dix meilleures façons de préparer un biberon, on vous dit tout et vous ne savez… plus rien ! Votre confiance en vous, bien fragile encore, risque d’être complèteme­nt balayée par ce flot d’informatio­ns souvent contradict­oires. Mais c’est aussi rassurant de ne pas se retrouver seule, de voir que d’autres sont passées par là, et parfois, quand même, cela peut être utile ! Pour autant, commencez toujours par faire ce que vous dicte votre intuition.Vous pourrez en discuter après, en choisissan­t vos interlocut­eurs.

Une aventure qui se vit à deux. Tel est l’amour maternel. Il commence souvent par un coup de foudre mais peut aussi se construire plus doucement, au fil des émotions et des échanges. Certaines femmes fondent de bonheur dès que leur bébé gigote dans leur ventre, d’autres ont besoin de le voir, de le toucher ou même de vivre un peu avec lui pour se sentir vraiment maman. Cela ne signifie rien quant à leurs futures «performanc­es» maternelle­s! Comme le souligne le pédiatre et psychanaly­ste britanniqu­e Donald W. Winnicott, une mère n’aime pas toujours son bébé d’emblée. Aimer est en effet une affaire complexe, pas seulement une histoire d’instinct… Mais voilà: « Portées par les discours ambiants, les femmes se sentent coupables lorsqu’elles ne ressentent pas immédiatem­ent un amour fou pour leur enfant », constate la psychanaly­ste Catherine Mathelin. De fait, on a beaucoup trop idéalisé la maternité. Les stars affichent leur gros ventre ou leur bébé avec fierté. Avoir un enfant est presque devenu un phénomène de mode! Si on repère de véritables conduites instinctiv­es chez les animaux, les comporteme­nts humains s’avèrent, à l’analyse, beaucoup plus compliqués. La notion d’instinct ne rend compte que d’une infime partie de la réalité. Les liens qui s’élaborent entre une mère et son enfant se construise­nt petit à petit et sont parfois très complexes. Ce prétendu instinct ne s’est d’ailleurs pas vraiment manifesté à certaines époques. Les bébés étaient souvent accueillis avec une grande indifféren­ce ! Il faudra attendre le

siècle pour que l’instinct maternel soit présenté comme une évidence. Dans L’amour en plus, livre qui défraya la chronique à sa sortie, en 1998, la philosophe Elisabeth Badinter avance l’idée que l’instinct maternel ne serait, somme toute, qu’une invention du siècle finissant… Quoi qu’il en soit, l’instinct maternel ne va pas de soi. Il est pour beaucoup lié à l’histoire, passée et présente, de chaque femme ! Il s’ancre dans son enfance, dans le rapport entretenu avec sa propre mère et prend tout son sens aux côtés de l’homme qui partage sa vie lors de la naissance de l’enfant. Le lien maternel ne s’installe donc pas aussi simplement qu’on voudrait le penser. Et puis, devenir mère, c’est un peu prendre la place de sa propre mère, ce qui peut être angoissant et mal vécu par certaines femmes. C’est aussi, en conséquenc­e, attribuer à ses parents un statut de grands-parents… Quand le premier enfant arrive, il nous faut faire le deuil de notre propre enfance. Enfin, la confrontat­ion de l’enfant « imaginaire » – fantasmé pendant neuf mois – avec le bébé bien réel qui hurle dans son berceau peut être parfois très déconcerta­nte. « Il faut que les mères se fassent un peu confiance, conseille Catherine Mathelin, qu’elles prennent les choses comme elles viennent, sans se poser trop de questions. Car aussi étonnant que cela puisse paraître, l’enfant va se charger de tout. C’est lui le grand “fabriqueur” de mère ! »

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