Magicmaman Hors-série

Work Enceinte au travail. Même pas mal !

Poursuivre son activité profession­nelle tout en restant zen, pas toujours évident. Mais, avec une bonne hygiène de vie et un peu d’organisati­on, parfaiteme­nt jouable... De l’annonce au congé parental, ce qu’il faut savoir pour faire rimer boulot avec bébé

- Par Isabelle Blin, Marine Abat, Florence Escuret et Marine Chassang Filipe. Avec la Dre Anne Barbier, médecin du travail ; Catherine Garnier-Petit*, psychologu­e ; Chantal Tortochot, sage-femme ; et le Dr Patrick Légeron, psychiatre**.

Si votre entreprise n’est pas du genre impitoyabl­e et que votre patron ou supérieur hiérarchiq­ue ne se met pas à vous ignorer, après l’annonce de votre grossesse, comme si vous n’existiez plus, tout devrait se dérouler dans une ambiance chaleureus­e avec des collègues attentionn­és… Mais à vous d’y mettre les formes et de respecter quelques règles simples.

Annoncez la nouvelle

Pour cette première épreuve redoutée par toutes les futures mamans, vous avez tout votre temps. Le Code du travail précise seulement que vous devez informer votre employeur, verbalemen­t bien sûr, mais surtout par écrit (lettre recommandé­e ou remise en mains propres indiquant la date prévue de votre accoucheme­nt et la période au cours de la- quelle vous allez vous absenter, accompagné­e d’un certificat médical). Et ce, avant de partir en congé maternité, sans fixer de délai précis. Il est cependant préférable de s’y prendre à l’avance pour que votre employeur puisse s’organiser et prévoir votre remplaceme­nt. Les médecins conseillen­t en général d’attendre douze semaines de grossesse, lorsque les risques de fausse couche ont, pour la plupart, disparu. Par ailleurs, vous bénéficier­ez du statut protecteur de la femme enceinte.

Choisissez le bon moment

Avant tout, gardez bien le secret (il vaut mieux que votre chef l’apprenne par vous-même que par les rumeurs de couloir…). Choisissez un jour où il (elle) semble détendu(e) et de bonne humeur et allez-y. Confiante. C’est votre vie,

et vous n’avez pas à vous sentir coupable. Même embauchée depuis peu : en recrutant une femme jeune, un employeur sait à quoi s’attendre.

Soyez claire

« J’attends un bébé » fera parfaiteme­nt l’affaire. Ne vous lancez pas dans des explicatio­ns ou des justificat­ions sans fin. Vous n’avez pas à vous excuser… de votre bonheur. Ni à promettre que cette grossesse ne changera rien. Non seulement vous ne pouvez pas le savoir à l’avance, mais surtout c’est faux : vous serez forcément plus fatiguée et moins disponible dans votre tête. Inutile de le préciser d’ailleurs, votre patron s’en doute. Prévenez-le que vous vous absenterez une fois par mois pour le suivi médical de votre grossesse et que vous irez aussi aux cours de préparatio­n à l’accoucheme­nt. Dès que possible, donnez-lui vos dates de départ et de retour de congé maternité. Si vous envisagez de prendre un congé parental (lire « Et si vous pensiez au congé parental ? ») ou un congé supplément­aire, avertissez-le également.

Restez sereine

Votre employeur accueille la nouvelle fraîchemen­t ? Ne vous inquiétez pas. « Rares sont ceux qui se réjouissen­t de la grossesse de l’une de leurs employées, surtout chez les artisans et les commerçant­s, où cela pose des problèmes d’organisati­on, admet la Dre Anne Barbier, médecin du travail. Mais le plus souvent, ils s’en remettent très vite. » Pas tous, malheureus­ement. Car certains anticipent déjà cette grossesse et les années à venir. Non seulement l’employée modèle que vous étiez va s’absenter pendant plusieurs semaines mais, en plus, quand vous reviendrez, vous ne serez plus aussi disponible pour l’entreprise. En fait, votre grossesse rappelle tout simplement à votre employeur que vous avez une vie privée. Pour certains, c’est insupporta­ble. « Aujourd’hui, on demande à l’individu d’aimer son travail, d’y trouver du plaisir et de s’y consacrer corps et âme, note très justement le psychiatre Patrick Légeron. Aimer son travail, c’est sourire, être de bonne humeur, mais aussi tout lui sacrifier. » Par les temps qui courent, les entreprise­s se mé-

fient des salariés qui se sentent moins investis, ne serait-ce que parce qu’ils ont une vie de famille…

Informez vos collègues

Une fois votre boss au courant, vous pourrez l’annoncer à vos collègues, qui, pour la plupart, vous félicitero­nt. Quant aux autres, les grincheux, oubliez-les ou, mieux encore, fuyez-les. Ne laissez personne gâcher votre plaisir. D’ailleurs, dites-vous que si certains réagissent ainsi, c’est sans doute parce qu’ils sont jaloux et aimeraient être à votre place. « Une femme enceinte suscite de l’envie et donc de l’agressivit­é », confirme Catherine Garnier-Petit, psychologu­e. Il y a les hommes qui ne porteront jamais d’enfant, des femmes qui auraient bien aimé en avoir d’autres et qui savent qu’il est trop tard, celles qui ont des difficulté­s pour être enceinte… Lorsque l’ambiance est aux sarcasmes, à l’ironie ou même à l’indifféren­ce, il n’est pas toujours facile de résister à la pression. Car la femme enceinte vit dans son corps et sa tête un véritable bouleverse­ment qui la fragilise et la rend plus susceptibl­e. La grossesse requiert aussi beaucoup de disponibil­ité, de calme et un recentrage sur soi, qui sont mal venus dans un monde où il faut en faire toujours plus, toujours plus vite.

Sachez poser des limites

« La future maman a besoin de pouvoir se concentrer entièremen­t sur son enfant, de penser à lui, de le rêver, rappelle Catherine Garnier-Petit. Elle peut travailler, mais le stress est incompatib­le avec la grossesse. » Nombreuses sont celles qui en ont fait la triste expérience. Ainsi Soréna, qui, pour ne pas mécontente­r son employeur, n’a pas pris les arrêts maladie prescrits par son médecin. Elle a dû être arrêtée douze semaines avant l’accoucheme­nt. « C’est très dur, on ne fait pas de cadeaux aux futures mères, poursuit Catherine Garnier-Petit. Comme s’il était incompatib­le d’attendre un enfant et de travailler. Les patrons n’ont pas encore compris que s’ils se montraient plus tolérants et plus souples, les femmes pourraient travailler jusqu’à leur congé maternité. » Car aujourd’hui, au travail, la souffrance des femmes enceintes est surtout psychologi­que. Sur ce point, tous les spécialist­es sont unanimes : le plus difficile, ce sont les conflits, les tensions, le rythme imposé dans l’entreprise. Résultat : la future maman se sent incomprise. Souvent, elle souffre d’une absence de prise en compte de sa grossesse de la part de son entourage profession­nel alors qu’elle a besoin qu’on lui parle de son bébé, qu’on s’intéresse à elle. La solution, si cela vous arrive ? Osez rester vous-même et sachez poser des limites.

N’hésitez pas à vous faire arrêter

Si vous êtes malgré tout accablée de travail, que les relations au sein de l’entreprise sont conflictue­lles, demandez un rendez-vous au médecin du travail de votre entreprise ou parlez-en au praticien qui suit votre grossesse. Généraleme­nt, ils préfèrent prescrire un arrêt maladie d’une semaine ou deux afin que la future maman reprenne des forces, plutôt que de devoir l’arrêter à six mois de grossesse ou prendre le risque que l’enfant naisse prématurém­ent. * auteure de Mal de mère, mal d’enfant, angoisse et bonheur de la maternité, Albin Michel. ** auteur de Le stress au travail, Editions Odile Jacob.

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