Work Enceinte au travail. Même pas mal !
Poursuivre son activité professionnelle tout en restant zen, pas toujours évident. Mais, avec une bonne hygiène de vie et un peu d’organisation, parfaitement jouable... De l’annonce au congé parental, ce qu’il faut savoir pour faire rimer boulot avec bébé
Si votre entreprise n’est pas du genre impitoyable et que votre patron ou supérieur hiérarchique ne se met pas à vous ignorer, après l’annonce de votre grossesse, comme si vous n’existiez plus, tout devrait se dérouler dans une ambiance chaleureuse avec des collègues attentionnés… Mais à vous d’y mettre les formes et de respecter quelques règles simples.
Annoncez la nouvelle
Pour cette première épreuve redoutée par toutes les futures mamans, vous avez tout votre temps. Le Code du travail précise seulement que vous devez informer votre employeur, verbalement bien sûr, mais surtout par écrit (lettre recommandée ou remise en mains propres indiquant la date prévue de votre accouchement et la période au cours de la- quelle vous allez vous absenter, accompagnée d’un certificat médical). Et ce, avant de partir en congé maternité, sans fixer de délai précis. Il est cependant préférable de s’y prendre à l’avance pour que votre employeur puisse s’organiser et prévoir votre remplacement. Les médecins conseillent en général d’attendre douze semaines de grossesse, lorsque les risques de fausse couche ont, pour la plupart, disparu. Par ailleurs, vous bénéficierez du statut protecteur de la femme enceinte.
Choisissez le bon moment
Avant tout, gardez bien le secret (il vaut mieux que votre chef l’apprenne par vous-même que par les rumeurs de couloir…). Choisissez un jour où il (elle) semble détendu(e) et de bonne humeur et allez-y. Confiante. C’est votre vie,
et vous n’avez pas à vous sentir coupable. Même embauchée depuis peu : en recrutant une femme jeune, un employeur sait à quoi s’attendre.
Soyez claire
« J’attends un bébé » fera parfaitement l’affaire. Ne vous lancez pas dans des explications ou des justifications sans fin. Vous n’avez pas à vous excuser… de votre bonheur. Ni à promettre que cette grossesse ne changera rien. Non seulement vous ne pouvez pas le savoir à l’avance, mais surtout c’est faux : vous serez forcément plus fatiguée et moins disponible dans votre tête. Inutile de le préciser d’ailleurs, votre patron s’en doute. Prévenez-le que vous vous absenterez une fois par mois pour le suivi médical de votre grossesse et que vous irez aussi aux cours de préparation à l’accouchement. Dès que possible, donnez-lui vos dates de départ et de retour de congé maternité. Si vous envisagez de prendre un congé parental (lire « Et si vous pensiez au congé parental ? ») ou un congé supplémentaire, avertissez-le également.
Restez sereine
Votre employeur accueille la nouvelle fraîchement ? Ne vous inquiétez pas. « Rares sont ceux qui se réjouissent de la grossesse de l’une de leurs employées, surtout chez les artisans et les commerçants, où cela pose des problèmes d’organisation, admet la Dre Anne Barbier, médecin du travail. Mais le plus souvent, ils s’en remettent très vite. » Pas tous, malheureusement. Car certains anticipent déjà cette grossesse et les années à venir. Non seulement l’employée modèle que vous étiez va s’absenter pendant plusieurs semaines mais, en plus, quand vous reviendrez, vous ne serez plus aussi disponible pour l’entreprise. En fait, votre grossesse rappelle tout simplement à votre employeur que vous avez une vie privée. Pour certains, c’est insupportable. « Aujourd’hui, on demande à l’individu d’aimer son travail, d’y trouver du plaisir et de s’y consacrer corps et âme, note très justement le psychiatre Patrick Légeron. Aimer son travail, c’est sourire, être de bonne humeur, mais aussi tout lui sacrifier. » Par les temps qui courent, les entreprises se mé-
fient des salariés qui se sentent moins investis, ne serait-ce que parce qu’ils ont une vie de famille…
Informez vos collègues
Une fois votre boss au courant, vous pourrez l’annoncer à vos collègues, qui, pour la plupart, vous féliciteront. Quant aux autres, les grincheux, oubliez-les ou, mieux encore, fuyez-les. Ne laissez personne gâcher votre plaisir. D’ailleurs, dites-vous que si certains réagissent ainsi, c’est sans doute parce qu’ils sont jaloux et aimeraient être à votre place. « Une femme enceinte suscite de l’envie et donc de l’agressivité », confirme Catherine Garnier-Petit, psychologue. Il y a les hommes qui ne porteront jamais d’enfant, des femmes qui auraient bien aimé en avoir d’autres et qui savent qu’il est trop tard, celles qui ont des difficultés pour être enceinte… Lorsque l’ambiance est aux sarcasmes, à l’ironie ou même à l’indifférence, il n’est pas toujours facile de résister à la pression. Car la femme enceinte vit dans son corps et sa tête un véritable bouleversement qui la fragilise et la rend plus susceptible. La grossesse requiert aussi beaucoup de disponibilité, de calme et un recentrage sur soi, qui sont mal venus dans un monde où il faut en faire toujours plus, toujours plus vite.
Sachez poser des limites
« La future maman a besoin de pouvoir se concentrer entièrement sur son enfant, de penser à lui, de le rêver, rappelle Catherine Garnier-Petit. Elle peut travailler, mais le stress est incompatible avec la grossesse. » Nombreuses sont celles qui en ont fait la triste expérience. Ainsi Soréna, qui, pour ne pas mécontenter son employeur, n’a pas pris les arrêts maladie prescrits par son médecin. Elle a dû être arrêtée douze semaines avant l’accouchement. « C’est très dur, on ne fait pas de cadeaux aux futures mères, poursuit Catherine Garnier-Petit. Comme s’il était incompatible d’attendre un enfant et de travailler. Les patrons n’ont pas encore compris que s’ils se montraient plus tolérants et plus souples, les femmes pourraient travailler jusqu’à leur congé maternité. » Car aujourd’hui, au travail, la souffrance des femmes enceintes est surtout psychologique. Sur ce point, tous les spécialistes sont unanimes : le plus difficile, ce sont les conflits, les tensions, le rythme imposé dans l’entreprise. Résultat : la future maman se sent incomprise. Souvent, elle souffre d’une absence de prise en compte de sa grossesse de la part de son entourage professionnel alors qu’elle a besoin qu’on lui parle de son bébé, qu’on s’intéresse à elle. La solution, si cela vous arrive ? Osez rester vous-même et sachez poser des limites.
N’hésitez pas à vous faire arrêter
Si vous êtes malgré tout accablée de travail, que les relations au sein de l’entreprise sont conflictuelles, demandez un rendez-vous au médecin du travail de votre entreprise ou parlez-en au praticien qui suit votre grossesse. Généralement, ils préfèrent prescrire un arrêt maladie d’une semaine ou deux afin que la future maman reprenne des forces, plutôt que de devoir l’arrêter à six mois de grossesse ou prendre le risque que l’enfant naisse prématurément. * auteure de Mal de mère, mal d’enfant, angoisse et bonheur de la maternité, Albin Michel. ** auteur de Le stress au travail, Editions Odile Jacob.