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Psycho enfant

A l’approche des fêtes, votre enfant vous pose de nombreuses questions sur le Père Noël. Faut-il le laisser y croire ? De même pour la Petite Souris ou les cigognes… Doit-on entretenir le mythe ? Est-ce mentir ?

- AVEC DANA CASTRO*, PSYCHOLOGU­E..

Dilemme parental. Père Noël… et autres « petits mensonges »

Maman, comment il fait, le Père Noël, pour passer si on n’a pas de cheminée ? Et comment il sait où j’habite?» Pas toujours facile de répondre sans avoir l’impression de trahir un peu son petit bout. En effet, vous apprenez dès leur plus jeune âge à vos enfants que ce n’est pas bien de mentir. Or, vous ne leur dites pas toujours la vérité sur tous les sujets… En tant que parents, vous vous retrouvez ainsi tiraillés entre arranger la vérité en racontant une petite histoire, par confort ou protection, ou être totalement transparen­ts avec votre enfant. Dilemme. Certains «mensonges» sont notamment assez courants, comme raconter que le Père Noël ne passera pas s’il n’est pas sage, que la Petite Souris va lui apporter une pièce à chaque dent de lait qui tombe ou encore que son grand-père s’est envolé pour rejoindre les étoiles dans le ciel… Doit-on culpabilis­er d’entretenir ces mythes?

LE PÈRE NOËL, LA PETITE SOURIS... BOBARDS OU JOLIES HISTOIRES ?

Pour Dana Castro, psychologu­e, les mythes modernes tels que le Père Noël ou la Petite Souris ne sont pas des mensonges, mais plutôt «des contes sans danger». Après tout, «un loup qui mange une grand-mère comme dans Le Petit

Chaperon rouge, n’est pas bien plus crédible, et pourtant, on laisse croire aux enfants que c’est de l’ordre du possible en leur racontant cette histoire », argumente-t-elle. Pour la spécialist­e, cela va même permettre de «stimuler l’imaginaire de l’enfant et de faire passer des messages». Ainsi, le tout-petit va comprendre l’importance du mérite et de la récompense puisqu’il doit être sage pour être gâté par le Père Noël. De la même manière, il va prendre conscience qu’il grandit avec ses dents de lait qui laissent place à ses dents d’adulte. « Les enfants ont besoin de rêves, d’un espace merveilleu­x et le Père Noël ou la Petite Souris ne sont rien de plus que les personnage­s d’une fiction, comme d’autres héros modernes», estime la psychologu­e. De toute manière, vers 5 ou 6 ans, voire avant, ils finissent par s’interroger et mettre en doute leur existence. «A ce moment-là, il faut leur expliquer qu’en effet, le Père Noël n’est pas un homme comme Papa par exemple, mais le héros d’une histoire. Soyez honnêtes, ils comprendro­nt… », précise la spécialist­e.

“PAPY EST PARTI AU CIEL / EST UN ANGE” : DIFFICILE DE SURMONTER SA PROPRE DOULEUR

D’autres «mensonges» traduisent plutôt une gêne du parent. C’est notamment le cas lors d’un décès dans une famille. « Le parent a du mal à dépasser sa propre peine et préfère éluder la question pour protéger son enfant», explique Dana Castro. C’est un réflexe plutôt fréquent, qui se comprend, et plus qu’un mensonge, il s’agit d’un évitement de la vérité. «Ce genre de métaphores pour aborder les sujets douloureux n’est pas contre-indiqué. En revanche, il faut absolument que l’enfant ait conscience que la personne ne reviendra pas, que son départ est définitif», insiste la psychologu­e. «Par contre, ce qui est sûr, c’est que vous avez le temps d’en parler à votre enfant. Prenez le temps nécessaire pour accepter cette mort afin d’en parler calmement avec lui. Les enfants n’ont pas besoin d’être informés le soir même du décès. Mais ils ont besoin qu’on leur parle pour qu’ils comprennen­t pourquoi Papa et Maman sont tristes. Il ne faut surtout pas le leur cacher, sous peine qu’ils vous le reprochent un jour, plus grands.»

“LES CIGOGNES APPORTENT LES BÉBÉS” : UN TABOU QUI DÉRANGE

Enfin, certains mythes que l’on raconte aux enfants naissent plutôt d’un tabou, notamment autour de la sexualité. C’est ainsi que les filles «naissaient dans les roses » et les garçons « dans les choux », ou encore qu’une gentille cigogne apportait les bébés aux parents. Mais ces histoires-là sont plus dérangeant­es que le Père Noël. « Je ne suis pas pour », déclare notre spécialist­e, qui prend ainsi position. Cela met en avant les propres inhibition­s du parent qu’il va transmettr­e à son enfant, pour qui la sexualité pourrait devenir un sujet gênant. Pourtant, entre 3 et 5 ans, avec l’âge des pourquoi, le tout-petit va poser beaucoup de questions et notamment: «Comment on fait les bébés?» Question à laquelle il faudra répondre simplement, et de manière adaptée à l’âge de l’enfant. Vous pouvez par exemple dire: «Les bébés grandissen­t dans le ventre de la maman, parce que Papa et Maman s’aiment.» Au final, plus que la réponse concrète, votre enfant attend de l’honnêteté et d’être rassuré. Dites-lui que lui aussi était dans le ventre de Maman avant qu’il naisse.

ET SI ON DÉCIDE DE NE PAS LEUR RACONTER CES HISTOIRES ?

On peut se demander si, à l’inverse, un enfant peut être en décalage s’il est le seul à ne pas croire au Père Noël. Pour Dana Castro, aucun problème avec cette décision mais à une condition : « Il faut raconter à l’enfant d’autres histoires. Il a besoin de sa part de rêve et d’imaginaire, de personnage­s inventés, pour se construire. Si on lui lit de jolis contes, si on joue avec lui, s’il a d’autres héros, tout ira bien », ajoute la psychologu­e. Et puis, à l’école, quand certains parleront de la Petite Souris ou du Père Noël, et que votre enfant exprimera qu’il n’y croit pas, cela entraînera un débat. «Le lien social se créera malgré ces différence­s de croyances, c’est certain », confirme-t-elle.

* Auteure de Petits silences, petits mensonges: Le jardin secret de l’enfant, Albin Michel.

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