Magicmaman

MULTI

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se l’était juré : cette année les cadeaux seraient faits en novembre. Déjà parce qu’il n’y a rien de plus pénible que de courir dans la bruine gelée le 24 décembre pour faire la fermeture des magasins de jouets. Mais aussi parce qu’elle a pu observer, en quelques années, la subtile inflation du prix du Lego tout au long du mois de décembre. Cette année, donc, elle se retrouve encore à errer dans les rues, les poignets sciés par ses cabas, à hurler au téléphone que «NON, elle ne peut pas gérer les gougères au fromage ET la bûche puisqu’elle est en ville et qu’il lui reste encore deux cadeaux à trouver». Elle raccroche presque au nez du Mâle à qui elle souhaite de s’étouffer avec les gougères de sa mère.

Côté cadeaux, elle a fait comme tous les ans depuis qu’ils ont trois enfants: trop. Pourtant, tous les ans, elle se promet de prendre trois fois moins l’année suivante. Parce qu’ils ont une chambre qui déborde de jouets, qu’ils ne sont pas soigneux et qu’ils veulent toujours ce qu’ils n’ont pas.

Ah, la magie de Noël… Multi respire à fond et tente de se calmer parce qu’au fond elle adore Noël. Le sapin qu’ils ont décoré tous les cinq (même si elle a passé ensuite une bonne heure à remonter toutes les boules à hauteur normale), les chants de Noël qui bercent leurs soirées depuis quelques semaines, les catalogues découpés pour faire les listes…

Ah, les listes… Après avoir ramassé les milliards de petits papiers mal découpés sur le sol de son salon, Multi a photograph­ié les listes, histoire d’avoir une base cadeau. Ensuite, elle a posté les lettres pour que ses petits reçoivent une réponse copiée collée photocopié­e à leur prénom. Ah, la magie de Noël!

Elle rentre juste à temps pour l’apéro, les gougères sortent à peine du four. Ils trinquent en famille, son beau-frère en profite pour lui détailler son dernier vol en planeur (passionnan­t) tandis que sa belle-mère tente de lui faire essayer une séance de tai-chi au club des Retraités Pas Moisis.

Le Mâle a décidé que, cette année, le Père Noël passerait vers 21h30, histoire de coucher tout le monde avant minuit et d’éviter le réveil à 5h30 en mode « hystérie » des enfants surexcités par les cadeaux.

Multi passera son repas à monter dans les chambres en mode ninja pour emballer les derniers cadeaux, avec du gros scotch marron puisque manifestem­ent l’invisible a disparu. Elle déposera discrèteme­nt avec le Mâle tous les cadeaux au pied du sapin tandis que Belle-Maman fera entonner des chants de Noël aux enfants à l’autre bout de la maison. Ils croient encore tous au Père Noël, ce sont des moments précieux (qui permettent également un petit chantage au «Père Noël qui ne passera pas» sur environ tous les sujets de conflit dès le mois de novembre…), se dit Multi. Jusqu’à ce que la troupe d’hystérique­s arrive, déballe tous ses cadeaux (ainsi que ceux des autres) en huit minutes. Un champ de bataille au milieu duquel pleure la Petite puisque ses frères lui ont ouvert tous ses cadeaux. Pleure le Moyen, qui aurait préféré l’Etoile Noire (à douze mille euros) plutôt que le petit vaisseau (qui a déjà coûté un demi-rein à Multi Papa Noyel). Dans lequel se vautre le Grand, à la recherche de cadeaux oubliés. Multi et le Mâle se regardent, heureux de retrouver dans les yeux de leurs trois enfants, cette magie qu’ils croyaient un peu disparue.

Multi soupire, mélange de bonheur et d’agacement. Il faudra encore attendre un an…

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