CÉPAGES OUBLIÉS
Bien qu’autorisés dans l’élaboration du champagne, l’arbane, le petit meslier, le pinot blanc et le pinot gris ont quasiment disparu des vignobles. Des vignerons passionnés bataillent pour remettre ces variétés délaissées au goût du jour.
Arbane, petit meslier, pinot blanc et pinot gris reviennent sur le devant de la scène grâce à la volonté de vignerons passionnés.
Pour faire du champagne, on peut bien sûr compter sur les trois stars du vignoble champenois (pinot noir, meunier et chardonnay), mais quatre autres cépages historiques, tous blancs, sont autorisés par l’AOC: l’arbane, le petit meslier, le pinot blanc (ou blanc vrai) et le pinot gris (autrefois nommé fromenteau ou «enfumé»), qui donnaient de bien jolies bulles. Les Champenois se sont désintéressés de ces raisins fragiles et capricieux, capables de rester verts plusieurs années d’affilée. Pis, leur rendement était médiocre, même au mieux de leur forme! Pas acceptable dans une région vinicole en proie aux démons productivistes. Les «mauvais élèves» devinrent si rares qu’ils n’occupent plus aujourd’hui qu’un petit 0,5% des 34 000 hectares plantés en Champagne. Des cépages «oubliés», mais… pas de tous. Une poignée de vignerons, attachés à la préservation de ce patrimoine, continue d’en bichonner quelques arpents. Comme les Tarlant, à OEuilly (Marne), chez qui s’élabore depuis des lustres une cuvée singulière à partir de pinot blanc, d’arbane et de petit meslier. Ou encore du côté de Jouy-lès-Reims, où Pierre et Philippe Aubry, désireux de renouer avec une viticulture ancestrale, découvrent en 1986, dans de vieux manuels, l’importance, autrefois, de ces variétés. Les deux frères, respectivement biologiste et oenologue, en retrouvent quelques ceps, les multiplient et les récoltent. Ainsi est né Le Nombre d’Or, qui réunit les sept cépages. C’est le vignoble de l’Aube qui recèle le plus grand nombre de pieds de chacun d’eux. Deux vénérables maisons familiales de la Côte des Bar, Drappier et Moutard Père & Fils, leur consacrent des cuvées exclusives, à l’instar de la coopérative Chassenay d’Arce, dont les adhérents veillent pieusement sur de vieilles parcelles de pinot blanc. Un cépage qui renaît aussi aux portes de Reims, grâce à Pierre Trichet, un vigneron au caractère affirmé… Comme les cépages rares.